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Jules Eynaudi est un félibre niçois, fondateur de l'Armanac Nissart, auteur de pièces de théâtre et d'un dictionnaire au caractère encyclopédique.
Eynaudi, Jules (1871-1948)
Jules Eynaudi est né le 6 mai 1871 dans le centre de Nice, la Vieille Ville. Il était le fils d'un tailleur lettré venu de Savillan, en Italie, et sa mère était du Comté de Nice. Le niçois se parlait naturellement autour de lui, dans la famille et avec les amis. Il entra comme typographe à l'imprimerie l'Éclaireur du Littoral à l'âge de quatorze ans. Il fit son service militaire en Corse et fut mobilisé pendant la guerre de 14.
En 1907, Eynaudi fut employé comme auxilliaire à la Bibliothèque Municipale de Nice.
Louis Cappatti (1886-1966), ami et collaborateur d'Eynaudi, décrit un homme "petit, élancé et vif, quoique badaud et d'une apparente nonchalance déhanchée, pipe aux lèvres, le feutre mou sur une oreille, l'ample lavallière nouée sous le menton, [...]" (CAPPATTI, 1937). Il semble qu'Eynaudi ait été un enfant puis un homme discret et modeste, ayant le goût du travail et de l'étude.
Il mourut à Nice en 1948.
Au moment où Eynaudi s'intéressait aux lettres et au particularisme de sa ville natale, le bassin niçois était traversé de conflits idéologiques territoriaux, toujours vifs après le rattachement de Nice à la France. Le rapport avec l'aire provençale en particulier se manifestait principalement dans une conception de voisinage, sans plus. Toutefois, des personnalités comme Joseph-Rosalinde Rancher (1785-1843), poète niçois d'expression occitane, avaient ouvert la voie du rapprochement avec les Provençaux, en particulier autour de la question de la langue.
En 1879, Antoine-Léandre Sardou (1803-1894, enseignant et érudit, niçois d'adoption mais provençal d'origine) fonda l'Escòla de Bellanda, avec Jean-Baptiste Calvino. La nouvelle école félibréenne s'occupa prioritairement de questions linguistiques : grammaire, lexique et réforme orthographique. Le niçois était alors généralement écrit sur le modèle orthographique italien. Sardou et Calvino recommandèrent la graphie mistralienne, adaptée aux particularités du niçois. L'école ne passa pas le cap du XIXème siècle et il fallut attendre 1927 pour voir naître une nouvelle école félibréenne, le Cairèu. Toutefois, une première pierre était posée qui permit à Eynaudi de continuer l'entreprise de renaissance niçoise en collaboration avec le Félibrige. Il devint mainteneur en 1902.
En 1903, il fonda l'Armanac Niçart, graphié Armanac Nissart à partir de 1928. La même année, il fut l'un des fondateurs principaux de l'Académie Rancher, qui devint en 1922 Lu Amic de Rancher. L'objectif de l'association n'était pas très différent de celui des écoles et revues félibréennes, et plus largement régionalistes : promotion de la langue et de la littérature niçoises, connaissance des traditions et de l'histoire locales.
Rancher représentait pour eux une figure paternelle du mouvement niçois. Ils lui vouaient une sorte de culte, faisant chaque année une visite de sa tombe, organisée par Eynaudi.
À peu près au même moment, le journaliste Henri Sappia (1833-1906) avait créé d'abord la revue Nice-Historique (1898) puis l'Acadèmia Nissarda (1904) qui rejoignait certains objectifs de l'association Rancher. Des passerelles se créèrent entre sociétés niçoises mais des tensions et désaccords nacquirent aussi. Eynaudi ne réussit pas même à réunir les propres collaborateurs de l'Armanac Nissart sur les questions graphique et félibréenne, malgré le soutien de Pierre Devoluy (qui demeura quelques années à Nice) et de Mistral lui-même. En 1922, il laissa la direction de la revue à Pierre Isnard, suivi de Louis Cappatti.
En 1901, Eynaudi avait publié sa première pièce de théâtre, Lou Cagancio, qui fut représentée sur scène en 1902. Il se fit l'un des héritiers de François Guisol (1803-1874), auteur et acteur qui publia des chansons et pièces de théâtre en niçois. De nombreuses compagnies de théâtre dialectal et de représentations folkloriques suivirent le mouvement : la compagnie du Théâtre de Barba-Martin (dirigée par Gustav-Adolf Mossa, 1883-1971, peintre symboliste et dramaturge occitan) ; la Ciamada Nissarda, qui existe toujours ; les Nissardas ; et Francis Gag (pseudonyme de Francis Gagliolo, 1900-1988, dramaturge occitan). En parallèle de ses articles, contes, chansons et poésies parues en revue, Eynaudi fit publier et jouer d'autres pièces durant les années suivantes. Il cherchait son inspiration dans la vie citadine de la Vieille Ville.
Entre 1931 et 1939, il se consacra à la rédaction et à la publication de son Dictionnaire de la langue niçoise, co-écrit avec Louis Cappatti notamment pour la partie historique de l'ouvrage. Le dictionnaire avait une vocation encyclopédique, donnant autant que possible le vocabulaire en usage, avec les définitions en français, les expressions et locutions, les conjugaisons, des entrées sur la flore et le paysage locaux, les noms propres féminins et masculins, les noms de lieux et les surnoms des habitants, des recettes de cuisine, des données historiques et etnologiques, etc. Les entrées sont parfois accompagnées d'extraits littéraires. Certaines sont signées par des collaborateurs autres qu'Eynaudi et Cappatti. Le dictionnaire fut rédigé en graphie mistralienne. Eynaudi était un félibre convaincu, pourtant le dictionnaire est très nuancé sur la question du Félibrige. Mistral n'apparaît pas dans les entrées et l'entrée Félibrige fut rédigée per Cappatti, qui faisait partie des sceptiques. Si dans la majorité des aires occitanes des groupes félibréens cohérents se créèrent (en parallèle d'autres groupes dits régionalistes), avec toujours une admiration affichée pour Mistral et le Félibrige, les Niçois conservèrent une certaine distance, malgré quelques enthousiastes, dûe à leurs rapports avec la Provence.
Le dictionnaire fut publié en fascicules, jusqu'à la lettre "p". La suite était restée à l'état de manuscrit. Une édition complète est parue en 2009, grâce à l'Acadèmia Nissarda avec une introduction de Remy Gasiglia (enseignant-chercheur à l'université de Nice Sophia Antipolis).
Eynaudi collabora à plusieurs revues et journaux : les Annales du Comté de Nice, l'Armanac Nissart, L'Éclaireur de Nice et du Sud-Est, L'Éclaireur du Soir, L'Éclaireur du Dimanche, L'Essor Niçois, Nice Historique, le Phare du Littoral, La Pignata, et probablement d'autres encore.
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