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Engagement dans la renaissance d’oc
Fondateur de l'Escolo de Mount-Segur (1894), de l'Escòla Occitana (1919) et du Collège d'Occitanie (1927), directeur de la revue Lo Gai Saber (1919-1933) et majoral du Félibre (1900), Prosper Estieu est l'une des personalités les plus importantes de la renaissance occitane du XXe siècle. Son activité aussi bien littéraire que politique et militante est aujourd'hui considérée comme l'une des premières émanations de l'occitanisme contemporain.
Estieu, Prosper (1860-1939)
- Prosper l'Été (pseudonyme)
- Prosper l'Estiu (pseudonyme)
- Jan d'Oc (pseudonyme)
- Jan de la Ròca (pseudonyme)
- Jean d'Occitanie (pseudonyme)
- Jean Trouvère (pseudonyme)
- La Cigala de l'Ort (pseudonyme)
Prosper Estieu est né le 7 juillet 1860 à Fendeille, au sud de Castelnaudary. Après des études au Collège de garçons de Castelnaudary et au Petit Séminaire de Carcassonne, où il étudie notamment le latin et le grec, il est nommé instituteur en 1879 à Coursan dans l’est de l’Aude.
Deux ans plus tard, alors en poste aux Brunels, près de Castelnaudary, il rencontre Auguste Fourès en tournée électorale pour les élections législatives de 1881. L’entente est immédiate car les deux hommes partagent de fortes valeurs républicaines et anticléricales. Ils fondent ainsi l’année suivante une revue française, La Poésie moderne, qui ne connaît que sept numéros, et où Estieu, sous le pseudonyme de Prosper l’Été, est en charge de la partie rédactionelle, uniquement en français. Il publie, toujours en 1882, son poème L’École dont Fourès signe la préface.
Après une parenthèse de deux ans dans le journalisme, Estieu décide de reprendre son métier d’instituteur et est nommé à Clermont sur Lauquet, près de Limoux. Il entame ensuite, à partir de 1887, des chroniques régulières dans la Revue méridionale, fondée à Carcassonne par Gaston Jourdanne, maire de la cité et futur majoral du Félibrige.
L’année 1891 marque un tournant dans le parcours de Prosper Estieu, c’est à cette date que meurt son ami et complice Auguste Fourès. Ce dernier, enterré une première fois selon le rite catholique, est inhumé une seconde fois, debout face à l’Orient comme le veut la tradition franc-maçonnique.
Lors de ces secondes funérailles Prosper Estieu fait une nouvelle rencontre fondamentale, celle d’Antonin Perbosc avec qui il partage une complicité semblable à celle qu’il entretenait avec Fourès. Les deux amis se jurent alors de continuer l’œuvre occitane du défunt poète. C’est à cette date que naît l’engagement occitan de Prosper Estieu qui n’avait jusque là jamais écrit en langue d’oc.
Suite à sa rencontre avec Antonin Perbosc, Prosper Estieu adhère à deux associations de promotion de la langue d’oc : l’Escolo Moundino de Toulouse puis l’Escolo Audenco où publient déjà Gaston Jourdanne et l’autre écrivain audois majeur de cette époque, Achille Mir. Ses productions occitanes commencent alors à se multiplier. En 1892, il fonde l’hebdomadaire Le Lengodoucian où il prend position dès le premier numéro pour un enseignement systématique de l’occitan à l’école primaire moins d’une dizaine d’années après les lois Jules Ferry sur l’instruction obligatoire gratuite et laïque. Son premier éditorial est d'ailleurs conclut par un tonitruant :
“Quand aurem fait la counquisto de las escolos primàrios, l’Aveni nous apartendra”. (Quand nous aurons fait la conquête des écoles primaires, l'avenir nous appartiendra)
En 1895, il publie son premier recueil de poésies occitanes, Lou Terradou, où il s’affirme comme le successeur d’Auguste Fourès, fidèle à ses idées fédéralistes et de lutte contre la domination française sur les contrées occitanes.
En 1896, il fonde, avec des félibres ariégeois, l’Escolo de Mountsegur et la revue Mount Segur qui paraît jusqu’en 1899. Elle se distingue des autres revues du genre par l’omniprésence des thématiques liées à l’albigéisme dont le symbole le plus connu, Montségur, prête son nom à la revue.
Après l’arrêt de la revue Mount Segur, Prosper Estieu publie Bordons pagans où il développe pour la première fois les règles d’une nouvelle graphie pour l’occitan où sont déjà présentes les prémices de la graphie contemporaine. Il développe cette graphie à partir de 1901 dans la seconde série de la revue Mont-Segur qu’il imprime d’ailleurs depuis son propre domicile à Rennes-le-Château jusqu’au mois de décembre 1904. Il est également élu majoral du félibrige en 1900 et maître ès Jeux de l’Académie des Jeux Floraux en 1902.
A partir de 1903, il prend clairement position au sein du félibrige contre les félibres provençaux et le capoulié (président) Pierre Devoluy. Il crée alors une nouvelle école (qui prendra pour nom en 1919 Escòla occitana) délaissant la graphie traditionnelle du félibrige, choisissant pour étendard le nom “occitan” alors très peu répandu et promouvant fermement des idées républicaines et anticléricales, toujours dans la continuité d’Auguste Fourès. C'est encore durant cette même période qu'il développe sa ligne idéologique, particulièrement sensible dans la revue Mont-Segur qu'il dirige avec Antonin Perbosc.
On y retrouve les quatre grandes problématiques qui marqueront le mouvement occitaniste au XXe siècle : la restauration de la langue dans son unité en s’inspirant du système graphique employé par les troubadours au Moyen Âge, l’émergence d’une littérature originale rédigée dans cette graphie nouvelle, une lecture nouvelle des rapports Nord/Sud au cours de l'histoire de France et l'innovation pédagogique alliée à la revendication de l’enseignement de l'occitan à l’école. Si certaines de ces thématiques étaient déjà partiellement envisagées par le félibrige du XIXe siècle, aucune n’avait été aussi développée jusque-là.
Il publie ensuite plusieurs ouvrages : Flors d’Occitania (1906), La Canson occitana (1908) et Lo Romancero occitan (1912 puis 1914). En 1911, il tente de faire ériger à Foix une statue dédiée à la parfaite cathare Esclarmonde et d’en faire la manifestation du félibrige rouge. Il renonce peu de temps après, faute d’engouement et suite au très mauvais accueil critique de son livre La Question d’Esclarmonde où il multiplie les erreurs et approximations historiques.
Après la guerre, il prend la direction du Gai Saber qu’il dirigera jusqu’en 1933 et fonde son association de promotion de la langue et de la culture occitanes, Los Grilhs del Lauragués, puis en 1927 le Collège d’Occitanie, association d’enseignement de la langue et de la culture occitanes.
Il publie à partir de 1926 une dernière série de recueils : Lo Flahut occitan, Las Bucolicas de Vergili (1926), Lo Fablièr occitan (1930) et Las Oras cantairas (1931) où se ressent l'influence catholique, de plus en plus prégnante, de son dernière disciple le futur chanoine Joseph Salvat. En 1933, il se retire chez sa fille et y meurt en 1939 après avoir été réconcilié avec la foi catholique par l’abbé Salvat, alors majoral du félibrige. Ce dernier prend alors à la suite de Prosper Estieu la tête de l’Escòla occitana et de la revue Lo Gai Saber.
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