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Somari
Pierre Biron (1861-1941), Norib en littérature, est un écrivain authentiquement paysan et un étonnant homme de culture ouvert à la culture classique comme à l’actualité de son temps.
Par sa profondeur philosophique, sa lucidité et ses idées avancées, il est une figure de référence, poète et prosateur de premier plan en langue occitane d’Auvergne, entre Planèze et Margeride. Son œuvre, disséminée dans la presse du temps, a été réunie dans deux ouvrages Poésies de Norib et Proses de Norib publiés aux Éditions Lo Convise (https://www.association-lo-convise.com) à Aurillac.
Biron, Pierre (1861-1941)
- Norib (pseudonyme)
- Toinou (pseudonyme)
- Toinou d'Areuzo (pseudonyme)
- Un Bourrut (pseudonyme)
- Pribon (pseudonyme)
- Probin (pseudonyme)
Pierre Biron (Norib en littérature) est une pure émanation de la terre d’Auvergne, entre Planèze et Margeride, où il a passé sa vie et qui garde la mémoire de son nom quoique ses œuvres, parues seulement dans la presse, n’aient jamais été publiées en livre. Écrivain paysan autodidacte cultivé, il est un témoin précieux de l’auvergnat parlé dans la première moitié du XXe siècle et un contributeur remarquable de la littérature d’oc.
Après leur mariage en 1958, son père, cultivateur à Montchanson et sa mère dont la famille était propriétaire à La Gazelle d’Anglards de Saint-Flour s’établirent à Paris dans le commerce des vins. C’est ainsi que Pierre Biron est né le 15 janvier 1861 dans la capitale où il a vécu ses premières années mais, comme la santé de l’enfant s’accordait mal à la grande ville, on le confia à sa grand-mère demeurée à La Gazelle.
Le décès prématuré du père en 1871 empêcha la famille appauvrie de financer les études qu’il fallait au petit Pierre épris de connaissances. Cette injustice originelle explique sa demande insistante de l’instruction pour tous et son amour des livres qui conduira peu à peu à une bibliothèque dont l’abondance et le niveau étonnent dans une ferme.
Loué comme pâtre à 15 ans, puis bouvier, aidant sa mère puis lui succédant sur la petite ferme de La Gazelle, il sera paysan toute sa vie, assumant pleinement sa condition : « Per venir vièlh, quò’s lo melhor mestièr. »
La jeunesse de Pierre Biron a été celle d’un autodidacte passionné, travaillant dur pour devenir un homme de culture, en butte aux préjugés selon lesquels un paysan n’a pas forcément besoin d’instruction mais aidé heureusement par deux oncles qui le pourvoyaient en bons livres classiques et modernes et en revues européennes.
C’est la presse qui l’a fait connaître et l’a conforté dans la voie littéraire. Il est poète en langue française tout d’abord. Ses vers de jeunesse, en français, inspirés par les premières exaltations amoureuses et une certaine « Mireille » sont perdus mais en 1895 les premières poésies publiées chantent la campagne, le laboureur, l’instruction et révèlent une sensibilité d’artiste attiré par l’art et la peinture.
Le publiciste sanflorain Pierre Raynal l’a orienté judicieusement vers l’expression occitane où il va s’imposer durablement avec des œuvres originales, profondes ou railleuses. Dans Quand ère pastre, la première de celles-ci, en 1895, il fait une lecture critique des réalités sociales à la campagne, bien différente des représentations félibréennes et relaye en Planèze le jeune félibre socialisant Louis Delhostal qui tentait une action de rénovation dans la revue de Vermenouze Lo Cobreto. Mais c’est plus encore en 1899 et 1900 que le récit plein de verve de ses tribulations avec deux femmes vengeresses à l’esprit corseté et la narration bourgeonnante de La Treva accroissent sa notoriété en Planèze. En 1900, il perd sa mère, épouse Jeanne Meyniel et à l’occasion pourra ajouter quelques menues rétributions de publiciste aux revenus de la ferme de La Gazelle.
Il est désormais et pour longtemps une valeur sûre de la presse régionale dans les colonnes du Courrier d’Auvergne, journal conservateur bien lu. Mais, au temps du combisme, Pierre Biron libère sa plume militante dans La Haute Auvergne républicaine sous le pseudonyme de Toinou d’Areuzo qui lui permet d’apparaître comme un libre penseur anticlérical cultivé, échappant à la peur de la mort ou de l’autorité. Pour alimenter d’autres journaux de la Planèze, il a utilisé – outre Biron son nom et Norib le pseudonyme littéraire qu’il a choisi – d’autres noms de plume plus ou moins reconnaissables. Particulièrement intéressant est Toinou, honnête homme ayant des clartés de tout, clin d’œil vers un épisode de l’enfance du général Antoine Drouot montrant que l’étude est libératrice.
Dans l’entre-deux guerres (1919-40), il est le grand poète de la Planèze, polémiste quand il faut, publié cette fois dans Lo Cobreto, proche idéologiquement du journal L’Union démocratique, figure tutélaire de La Glèbe (organe de l’Office agricole de Saint-Flour), reconnu par les grands esprits, les futures grandes figures de la Résistance (Louis Mallet, René Amarger…) qui maintiendront le souvenir de son œuvre. Le progressiste militant qu’il était comprend pleinement désormais l’avertissement d’Edgar Quinet aux écoliers du XIXe siècle : « Aucune machine ne vous exemptera d’être homme ». La guerre d’Espagne, la montée des périls assombrissent sa vieillesse.
Il meurt le 30 septembre 1941.
L’œuvre de Pierre Biron est une composante de premier plan du patrimoine nord-occitan. D’abord parce qu’elle illustre de belle manière la langue d’oc en usage en Planèze au contact de la Margeride. Ses proses variées, contes, légendes, récits inspirés par des faits vrais ou imaginés, réactions à l’actualité, poèmes en prose, pages de vulgarisation associent sa clairvoyance au paysage d’Anglards près duquel l’Ander rejoint la Truyère, en deçà de Montchanson.
Elle exprime un homme complet qui vit le travail de la terre aux ramifications cosmiques, la poésie de la nature et des saisons, l’actualité aux horizons lointains, qui s’intéresse aux artistes et aux savants, aux classiques, aux contemporains, aux petits, avec les intuitions généreuses et écologiques qu’il faut réactiver dans le monde d’aujourd’hui.
Les anthologies soulignent souvent la profondeur de son inspiration en retenant des poèmes comme « Tristessa » (connu aussi sous le titre de « Dolors »), « La Mòrt d’un cri-cri », « Ponhada de vartats », « Ma Tesa »… mais sa prose est également intéressante.
L’intégrale de ses œuvres est parue aux Éditions du Convise sous les titres Poésies de Norib, 2012 (720 p.) et Proses de Norib, 2013 (704 p). Les notes qui accompagnent les textes apportent parfois quelques informations sur la vie littéraire occitane en planèze et au-delà, peu étudiée jusqu’ici.
Cette édition intégrale contient une bibliographie complète des articles ou poèmes parus dans :
- La République libérale
- Le Courrier d’Auvergne
- Le Progrès du Cantal
- La Haute Auvergne
- L’Union démocratique
- Lo Cobreto / La cabreta
- L’Armanac d’Auvernha
- Le Démocrate de Saint-Flour et de Murat
- La Glèbe
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