Roux, Joseph (1834-1905)
Joseph Roux est né le 19 avril 1834 à Tulle, dernier venu d'une fratrie nombreuse, fils d'un cordonnier plutôt aisé.
Destiné tôt au clergé, il commence son parcours d'écolier chez les Frères de Tulle, puis il passe au Petit Séminaire de Servières-le-Château, au Collège de Tulle, au Petit Séminaire de Brive et enfin au Grand Séminaire de Tulle.
Il présente « un goût profond pour les auteurs classiques et pour le latin », selon les mots de Joseph Nouaillac1.
Il est ordonné prêtre en 1858. Il est professeur au Petit Séminaire de Brive pendant quelque temps mais la situation ne lui convient pas et il obtient le poste de vicaire à Varetz. Il écrit ses Hymnes et Poésies en l'Honneur de la Vierge Marie (publiés en 1865). En 1864 il est nommé à Saint-Sylvain, localité qui ne lui agrée pas mais où il lui faudra pourtant rester douze longues années dans l'isolement. L'endroit est décrit par Nouaillac comme un fond de vallée encaissée, austère et sombre. Il se met à remplir des cahiers de pensées et maximes qui feront l'objet d'une brochure en 1866 sous le titre Pensées (maximes, études, images).
En 1870, pour se sortir de Saint-Sylvain, il accepte un poste de précepteur en Normandie, qu'il lui faut laisser au bout de quelques mois à cause de la guerre.
Il revient à Saint-Sylvain jusqu'en 1876, date à laquelle il obtient enfin une autre place de prêtre à Saint-Hilaire-Peyrou. C'est durant ces années qu'il commence à se consacrer sérieusement à des études sur la langue et à sa production littéraire en occitan.
En 1885, les Pensées sont publiées à Paris. C'est Paul Mariéton2 qui, dans un premier temps, fait paraître les pensées et maximes dans la Revue Lyonnaise (entre autres) et devant le succès, entreprend une sélection qui sera publiée en recueil chez Lemerre. La renommée de Roux ne se fait pas attendre dans le milieu intellectuel français et international, globalement plutôt bienveillant. Des noms comme Ernest Renan (1823-1892, homme de lettres), Francisque Sarcey (1827-1899, critique et journaliste), Elme Caro (1826-1887, philosophe et critique littéraire), Félicien Champsaur (1858-1934, journaliste) ou Jules Lemaître (1853-1914, critique et écrivain) ont signé des conférences et articles sur le recueil et sur son auteur. Les Pensées furent traduites en anglais et étudiées en Allemagne. Un Prix Montyon de 1500 francs lui est remis en 1886 par l'Académie Française. Un "bémol", toutefois : le chapitre sur les paysans est jugé trop sévère, dans le milieu "bien-pensant", de la part d'un homme de Dieu. Pour certains commentateurs, il révèle plutôt une vision réaliste et lucide pas si dédaigneuse.
En 1886 il est nommé chanoine de Tulle. Sa volonté de devenir évêque ne sera jamais satisfaite.
Les Nouvelles Pensées, constituées en substance de ce que Mariéton n'avait pas sélectionné pour le premier recueil, paraissent en 1887, et leur réception plutôt négative a un goût amer pour Roux qui s'investit toujours plus dans les activités félibréennes.
En 1897 il obtient la croix de la Légion d'Honneur.
Il meurt de maladie (grippe ou bronchopneumonie), à Tulle, le 4 février 1905.
Une plaque commémorative a été posée sur sa maison. Un médaillon façonné par la sculptrice et graveuse Geneviève Granger-Chanlaine (1877-1967) a été inauguré en 1934. Quelques années avant sa mort, son portrait a été peint par les sœurs Cécile et Marie Desliens (artistes peintres, respectivement 1853-1937 et 1856-1938) et exposé au Salon de 1901 de la Société Nationale des Beaux-Arts à Paris3.
Dans son article « Histoire d'un curé de campagne », Jean Nesmy4 évoque le climat maussade et l'environnement triste qui auraient fait de Roux un enfant puis un homme grave, sérieux. L'abbé est généralement décrit comme un homme imposant, haut, large d'épaules, au regard clair et la voix puissante. Ses ambitions et son franc-parler, ainsi que sa notoriété, ne sont pas du goût de tout le monde et il en souffrira toute sa vie.
Il connaît la langue depuis toujours, il connaît aussi les proverbes et les légendes du pays, entendus dans la rue et dans la campagne, pendant son enfance comme pendant sa carrière de prêtre. Il s'essaie de bonne heure à la versification en français, en occitan mais aussi en latin et toute sa vie durant il ressent le besoin d'écrire. C'est ainsi qu'en 1874, il présente à l'occasion du Vème centenaire de la mort de Pétrarque à Avignon un sonnet en occitan qui sera couronné. Il rencontre alors Mistral, Roumanille, Aubanel et d'autres félibres qui l'encouragent à continuer. En 1976 il est élu Majoral du Félibrige (« Cigale du Limousin »). Il participe aux fêtes latines de Montpellier en 1878.
Depuis les années 1870, Joseph Roux est largement publié dans les revues locales de Corrèze, mais pas seulement, et ses écrits en français et en occitan sont connus des lecteurs de la Revue des Langues Romanes, la Revue Lyonnaise, la Revue du Monde Latin, la Revue félibréenne, la Gazette d'Augsbourg et d'autres encore. Dans la Revue des Langues Romanes, ont été publiés entre autres les premiers épisodes de son « épopée », la Chansou Lemouzina, qui seront récompensés en 1882 du rameau vert de laurier à Montpellier.
La Chansou Lemouzina, publiée en 1889, est composée de vingt-quatre poèmes lyriques, chacun peignant un épisode de l'histoire ou du légendaire du bas-Limousin depuis le Vème jusqu'au XIXème siècle (à noter que l'héroïne de « Marguerite Chastang » est sa propre mère). Les félibres limousins n'hésitent pas à comparer Roux à Mistral, et la Chansou à Mirèïo ou Calendal.
L'abbé recevra plusieurs autres récompenses au cours de sa carrière, aux Jeux Floraux d'Avignon, Apt, Forcalquier ou encore au concours de la Société Archéologique de Béziers (médaille d'argent en 1877 et en 1878).
Sa littérature compte aussi des poèmes, des fables, une série de Rustiques (textes en français qui mettent en scène les usages populaires et les croyances du Limousin) pour la plupart publiés dans la presse ou restés manuscrits. On peut ajouter des énigmes et proverbes collectés et publiés.
En 1893 il participe à la création de l'École Limousine à Brive et il en devient le capiscòl. La société parisienne la Ruche Corrézienne vient d'être créée aussi et ses membres sont en relation étroite avec les félibres de la province. Roux collabore à la revue Lemouzi, organe de l'école. D'autres écoles naissent dans les villes alentours et forment une fédération d'écoles limousines dont Roux sera le chaptal. La Sainte-Estelle de 1895 est organisée à Brive. Joseph Roux, admiré pour son esprit combatif, sert de figure tutélaire à la renaissance limousine portée par un groupe de félibres enthousiastes. On peut citer entre autres Sernin Santy (1850-1906), un des fondateurs du Félibrige limousin et de la revue ; Johannès Plantadis (1864-1922), historien et ethnologue, animateur de la Ruche Corrézienne à Paris ; Marguerite Genès (1868-1955), institutrice et poétesse ; Eusèbe Bombal (1827-1915), érudit, archéologue et écrivain ; plus récemment Robert Joudoux (1939-2016), homme de lettres, directeur de Lemouzi.
L'abbé s'est investi de bonne heure dans ce qu'il considérait comme un travail d'épuration de la langue nécessaire après des siècles de dégâts causés par l'influence du français, tant dans la graphie que dans le vocabulaire. Il étudie des textes anciens et en particulier les textes des troubadours, en raison d'une origine limousine historique prêtée aux premiers troubadours. Il collecte aussi de la matière dans le parler de ses contemporains : proverbes, énigmes (« sourcelages » selon son mot), légendes et autres. À partir de ses observations, il reconstitue une graphie inspirée de celle des textes médiévaux et s'efforce de retirer tout emprunt au français.
Cette tâche donne lieu d'une part à une Grammaire Limousine, qui paraît d'abord par morceaux dans la revue Lemouzi avant de faire l'objet d'une édition en 1895, et à un dictionnaire de l'ambition du Trésor du Félibrige, la Lengua d'Aur, resté à l'état de manuscrit. Dans une lettre à Plantadis datée du 21 février 19055, Mistral témoigne de sa reconnaissance à Roux, pour le prêt de son manuscrit comme contribution au Trésor. Certains commentateurs du travail de Roux le voient comme un précurseur, avec Auguste Fourès (1848-1891) et même Mistral, de la graphie élaborée par Antonin Perbosc (1861-1944) et Prosper Estieu (1860-1939). L'abbé Joseph Salvat (1889-1972) dit : « Ce que Mistral avait entrevu, ce que Roux avait entrepris, Estieu et Perbosc, nos maîtres de l'Escola Occitana, l'ont réalisé »6. Mais une telle entreprise ne peut pas faire l'unanimité, et Nesmy évoque les détracteurs accusant l'abbé de créer une langue littéraire et fictive, que le peuple ne pourra pas lire ni comprendre. Le Félibrige limousin soutient l'abbé dans sa démarche, les détracteurs sont probablement plutôt des limousins extérieurs au Félibrige, ou éventuellement des gens, félibres ou non, étrangers au Limousin. La graphie dite mistralienne a fait son chemin et est très populaire dans l'espace occitan, adaptée ici et là dans son application. Cependant l'abbé Roux est aujourd'hui retenu comme un des acteurs de la construction graphique de l'occitan.
1-« Joseph Roux et la renaissance limousine », Lemouzi, 1905, p. 75. Joseph Nouaillac (1880-1947) fut professeur et historien spécialiste du Limousin.
2-Paul Mariéton (1862-1911), poète, félibre, fondateur de la Revue Félibréenne.
3-L'Intransigeant, 22 avril 1901, pp. 1 e 3.
4-La Revue hebdomadaire, 1905, n°27, pp. 167-195. Jean Nesmy est le pseudonyme de Henry Surchamp (1876-1959), écrivain régionaliste.
5-Reproduite dans Lemouzi, 1905, p. 102.
6-Lo Gai Saber, numéro spécial, avril 1934, n°114, p. 379.
Joseph Roux est un prêtre du canton de Tulle, en Corrèze. Il est connu avant tout comme l'auteur d'un recueil en français, Pensées, qui l'a rendu célèbre en France et à l'étranger. Il se consacre ensuite à la renaissance limousine en participant activement au Félibrige. Ses œuvres principales en occitan sont la Chansou Lemouzina et la Grammaire Limousine.
Roux, Joseph (1834-1905)
Joseph Roux est né le 19 avril 1834 à Tulle, dernier venu d'une fratrie nombreuse, fils d'un cordonnier plutôt aisé.
Destiné tôt au clergé, il commence son parcours d'écolier chez les Frères de Tulle, puis il passe au Petit Séminaire de Servières-le-Château, au Collège de Tulle, au Petit Séminaire de Brive et enfin au Grand Séminaire de Tulle.
Il présente « un goût profond pour les auteurs classiques et pour le latin », selon les mots de Joseph Nouaillac1.
Il est ordonné prêtre en 1858. Il est professeur au Petit Séminaire de Brive pendant quelque temps mais la situation ne lui convient pas et il obtient le poste de vicaire à Varetz. Il écrit ses Hymnes et Poésies en l'Honneur de la Vierge Marie (publiés en 1865). En 1864 il est nommé à Saint-Sylvain, localité qui ne lui agrée pas mais où il lui faudra pourtant rester douze longues années dans l'isolement. L'endroit est décrit par Nouaillac comme un fond de vallée encaissée, austère et sombre. Il se met à remplir des cahiers de pensées et maximes qui feront l'objet d'une brochure en 1866 sous le titre Pensées (maximes, études, images).
En 1870, pour se sortir de Saint-Sylvain, il accepte un poste de précepteur en Normandie, qu'il lui faut laisser au bout de quelques mois à cause de la guerre.
Il revient à Saint-Sylvain jusqu'en 1876, date à laquelle il obtient enfin une autre place de prêtre à Saint-Hilaire-Peyrou. C'est durant ces années qu'il commence à se consacrer sérieusement à des études sur la langue et à sa production littéraire en occitan.
En 1885, les Pensées sont publiées à Paris. C'est Paul Mariéton2 qui, dans un premier temps, fait paraître les pensées et maximes dans la Revue Lyonnaise (entre autres) et devant le succès, entreprend une sélection qui sera publiée en recueil chez Lemerre. La renommée de Roux ne se fait pas attendre dans le milieu intellectuel français et international, globalement plutôt bienveillant. Des noms comme Ernest Renan (1823-1892, homme de lettres), Francisque Sarcey (1827-1899, critique et journaliste), Elme Caro (1826-1887, philosophe et critique littéraire), Félicien Champsaur (1858-1934, journaliste) ou Jules Lemaître (1853-1914, critique et écrivain) ont signé des conférences et articles sur le recueil et sur son auteur. Les Pensées furent traduites en anglais et étudiées en Allemagne. Un Prix Montyon de 1500 francs lui est remis en 1886 par l'Académie Française. Un "bémol", toutefois : le chapitre sur les paysans est jugé trop sévère, dans le milieu "bien-pensant", de la part d'un homme de Dieu. Pour certains commentateurs, il révèle plutôt une vision réaliste et lucide pas si dédaigneuse.
En 1886 il est nommé chanoine de Tulle. Sa volonté de devenir évêque ne sera jamais satisfaite.
Les Nouvelles Pensées, constituées en substance de ce que Mariéton n'avait pas sélectionné pour le premier recueil, paraissent en 1887, et leur réception plutôt négative a un goût amer pour Roux qui s'investit toujours plus dans les activités félibréennes.
En 1897 il obtient la croix de la Légion d'Honneur.
Il meurt de maladie (grippe ou bronchopneumonie), à Tulle, le 4 février 1905.
Une plaque commémorative a été posée sur sa maison. Un médaillon façonné par la sculptrice et graveuse Geneviève Granger-Chanlaine (1877-1967) a été inauguré en 1934. Quelques années avant sa mort, son portrait a été peint par les sœurs Cécile et Marie Desliens (artistes peintres, respectivement 1853-1937 et 1856-1938) et exposé au Salon de 1901 de la Société Nationale des Beaux-Arts à Paris3.
Dans son article « Histoire d'un curé de campagne », Jean Nesmy4 évoque le climat maussade et l'environnement triste qui auraient fait de Roux un enfant puis un homme grave, sérieux. L'abbé est généralement décrit comme un homme imposant, haut, large d'épaules, au regard clair et la voix puissante. Ses ambitions et son franc-parler, ainsi que sa notoriété, ne sont pas du goût de tout le monde et il en souffrira toute sa vie.
Il connaît la langue depuis toujours, il connaît aussi les proverbes et les légendes du pays, entendus dans la rue et dans la campagne, pendant son enfance comme pendant sa carrière de prêtre. Il s'essaie de bonne heure à la versification en français, en occitan mais aussi en latin et toute sa vie durant il ressent le besoin d'écrire. C'est ainsi qu'en 1874, il présente à l'occasion du Vème centenaire de la mort de Pétrarque à Avignon un sonnet en occitan qui sera couronné. Il rencontre alors Mistral, Roumanille, Aubanel et d'autres félibres qui l'encouragent à continuer. En 1976 il est élu Majoral du Félibrige (« Cigale du Limousin »). Il participe aux fêtes latines de Montpellier en 1878.
Depuis les années 1870, Joseph Roux est largement publié dans les revues locales de Corrèze, mais pas seulement, et ses écrits en français et en occitan sont connus des lecteurs de la Revue des Langues Romanes, la Revue Lyonnaise, la Revue du Monde Latin, la Revue félibréenne, la Gazette d'Augsbourg et d'autres encore. Dans la Revue des Langues Romanes, ont été publiés entre autres les premiers épisodes de son « épopée », la Chansou Lemouzina, qui seront récompensés en 1882 du rameau vert de laurier à Montpellier.
La Chansou Lemouzina, publiée en 1889, est composée de vingt-quatre poèmes lyriques, chacun peignant un épisode de l'histoire ou du légendaire du bas-Limousin depuis le Vème jusqu'au XIXème siècle (à noter que l'héroïne de « Marguerite Chastang » est sa propre mère). Les félibres limousins n'hésitent pas à comparer Roux à Mistral, et la Chansou à Mirèïo ou Calendal.
L'abbé recevra plusieurs autres récompenses au cours de sa carrière, aux Jeux Floraux d'Avignon, Apt, Forcalquier ou encore au concours de la Société Archéologique de Béziers (médaille d'argent en 1877 et en 1878).
Sa littérature compte aussi des poèmes, des fables, une série de Rustiques (textes en français qui mettent en scène les usages populaires et les croyances du Limousin) pour la plupart publiés dans la presse ou restés manuscrits. On peut ajouter des énigmes et proverbes collectés et publiés.
En 1893 il participe à la création de l'École Limousine à Brive et il en devient le capiscòl. La société parisienne la Ruche Corrézienne vient d'être créée aussi et ses membres sont en relation étroite avec les félibres de la province. Roux collabore à la revue Lemouzi, organe de l'école. D'autres écoles naissent dans les villes alentours et forment une fédération d'écoles limousines dont Roux sera le chaptal. La Sainte-Estelle de 1895 est organisée à Brive. Joseph Roux, admiré pour son esprit combatif, sert de figure tutélaire à la renaissance limousine portée par un groupe de félibres enthousiastes. On peut citer entre autres Sernin Santy (1850-1906), un des fondateurs du Félibrige limousin et de la revue ; Johannès Plantadis (1864-1922), historien et ethnologue, animateur de la Ruche Corrézienne à Paris ; Marguerite Genès (1868-1955), institutrice et poétesse ; Eusèbe Bombal (1827-1915), érudit, archéologue et écrivain ; plus récemment Robert Joudoux (1939-2016), homme de lettres, directeur de Lemouzi.
L'abbé s'est investi de bonne heure dans ce qu'il considérait comme un travail d'épuration de la langue nécessaire après des siècles de dégâts causés par l'influence du français, tant dans la graphie que dans le vocabulaire. Il étudie des textes anciens et en particulier les textes des troubadours, en raison d'une origine limousine historique prêtée aux premiers troubadours. Il collecte aussi de la matière dans le parler de ses contemporains : proverbes, énigmes (« sourcelages » selon son mot), légendes et autres. À partir de ses observations, il reconstitue une graphie inspirée de celle des textes médiévaux et s'efforce de retirer tout emprunt au français.
Cette tâche donne lieu d'une part à une Grammaire Limousine, qui paraît d'abord par morceaux dans la revue Lemouzi avant de faire l'objet d'une édition en 1895, et à un dictionnaire de l'ambition du Trésor du Félibrige, la Lengua d'Aur, resté à l'état de manuscrit. Dans une lettre à Plantadis datée du 21 février 19055, Mistral témoigne de sa reconnaissance à Roux, pour le prêt de son manuscrit comme contribution au Trésor. Certains commentateurs du travail de Roux le voient comme un précurseur, avec Auguste Fourès (1848-1891) et même Mistral, de la graphie élaborée par Antonin Perbosc (1861-1944) et Prosper Estieu (1860-1939). L'abbé Joseph Salvat (1889-1972) dit : « Ce que Mistral avait entrevu, ce que Roux avait entrepris, Estieu et Perbosc, nos maîtres de l'Escola Occitana, l'ont réalisé »6. Mais une telle entreprise ne peut pas faire l'unanimité, et Nesmy évoque les détracteurs accusant l'abbé de créer une langue littéraire et fictive, que le peuple ne pourra pas lire ni comprendre. Le Félibrige limousin soutient l'abbé dans sa démarche, les détracteurs sont probablement plutôt des limousins extérieurs au Félibrige, ou éventuellement des gens, félibres ou non, étrangers au Limousin. La graphie dite mistralienne a fait son chemin et est très populaire dans l'espace occitan, adaptée ici et là dans son application. Cependant l'abbé Roux est aujourd'hui retenu comme un des acteurs de la construction graphique de l'occitan.
1-« Joseph Roux et la renaissance limousine », Lemouzi, 1905, p. 75. Joseph Nouaillac (1880-1947) fut professeur et historien spécialiste du Limousin.
2-Paul Mariéton (1862-1911), poète, félibre, fondateur de la Revue Félibréenne.
3-L'Intransigeant, 22 avril 1901, pp. 1 e 3.
4-La Revue hebdomadaire, 1905, n°27, pp. 167-195. Jean Nesmy est le pseudonyme de Henry Surchamp (1876-1959), écrivain régionaliste.
5-Reproduite dans Lemouzi, 1905, p. 102.
6-Lo Gai Saber, numéro spécial, avril 1934, n°114, p. 379.
Joseph Roux es un clèrgue del canton de Tula, en Corrèsa. Es conegut primièr coma l'autor d'un recuèlh en francés, Pensées, que l'a rendut famós en França e a l'estrangièr. Se consacra puèi a la renaissença lemosina en participant activament al Felibritge. Sas òbras màgers en occitan son la Chansou Lemouzina e la Grammaire Limousine.
Roux, Joseph (1834-1905)
Joseph Roux es nascut lo 19 d'abril de 1834 a Tula, darrièr vengut d'una frairia nombrosa, filh d'un sabatièr puslèu aisat.
Destinat d'ora al clergat, comença son percors d'escolan en cò dels Fraires de Tula, puèi passa al Pichon Seminari de Serviera, al Collègi de Tula, al Pichon Seminari de Briva e enfin al Grand Seminari de Tula.
Presenta « un gost prigond per los autors classics e per lo latin », segon los mots de Joseph Nouaillac1.
Es ordonat prèire en 1858. Fa lo professor al Pichon Seminari de Briva pendent un temps mas la situacion li conven pas e obten la posicion de vicari a Vares. Escriu sos Hymnes et Poésies en l'Honneur de la Vierge Marie (publicats en 1865). En 1864 es mandat coma prèire a Sent Silvan, localitat que li sembla pas tròp gaujosa mas ont li caldrà demorar dotze longas annadas dins l'isolament. L'endrech es descrich per Nouaillac coma un fond de valada encaissat, austèr e sorn. Comença d'emplenar de quasèrns de pensadas e maximas que faràn l'objècte d'una brocadura en 1866 jos lo títol Pensées (maximes, études, images).
En 1870, per se sortir de Sent Silvan, accepta un pòste de preceptor en Normandia, que li cal quitar al cap d'unes meses per causa de la guèrra.
Torna a Sent Silvan fins a 1876, data a la quala obten enfin una autra plaça de prèire a Sent Alari Peiros. Es dins aquelas annadas que comença de se consacrar seriosament a d'estudis sus la lenga e a sa produccion literària en occitan.
En 1885, las Pensées son publicadas a París. Es Paul Mariéton2 que, dins un primièr temps, fa paréisser las pensadas e maximas dins la Revue Lyonnaise (entre autre) e davant lo succès, entrepren una seleccion publicada en recuèlh a cò de Lemerre. La renommada de Roux se fa pas esperar dins lo mitan intellectual francés e internacional, globalament puslèu benvolent. De noms coma Ernest Renan (1823-1892, òme de letras), Francisque Sarcey (1827-1899, critic e jornalista), Elme Caro (1826-1887, filosòf e critic literari), Félicien Champsaur (1858-1934, jornalista) o Jules Lemaître (1853-1914, critic e escrivan) an signat conferéncias e articles sul recuèlh e sus son autor. Las Pensées foguèron traduchas en anglés e estudiadas en Alemanha. Un Prèmi Montyon de 1500 francs li es remés en 1886 per l'Académia Francesa. Un "bemòl", pasmens : lo capítol suls païsans es jutjat tròp sevèr, dins lo mitan "ben-pensant", de la part d'un òme de Dieu. Per d'unes comentators, revèla puslèu una vision realista e lucida pas tant desdenhosa.
En 1886 es nommat canonge de Tula. Sa volontat de venir evesque serà pas jamai satisfacha.
Las Nouvelles Pensées, constituïdas en substància de çò que Mariéton aviá daissat de caire per lo primièr recuèlh, pareisson en 1887, e lor recepcion puslèu negativa a un gost amar per Roux que s'investís que mai dins las activitats felibrencas.
En 1897 obten la crotz de la Legion d'Onor.
Morís de malautiá (gripa o broncho-pneumonia), a Tula, lo 4 de febrièr de 1905.
Una placa comemorativa es estada pausada sus son ostal. Un medalhon fargat per l'escultora e gravaira Geneviève Granger-Chanlaine (1877-1967) es estat inaugurat en 1934. Qualques annadas abans sa mòrt, son retrach es pintrat per las sòrres Cécile e Marie Desliens (artistas pintras, respectivament 1853-1937 e 1856-1938) e expasaut al Salon de 1901 de la Société Nationale des Beaux-Arts a París3.
Dins son article « Histoire d'un curé de campagne », Jean Nesmy4 evòca lo climat sorn e l'environament triste qu'aurián fach de Roux un enfant puèi un òme grèu, seriós. L'abat es generalament descrich coma un òme impausant, naut, larg d'espatlas, de l'agach clar e de la votz fòrta. Sas ambicions amb son franc-parlar, tal coma sa notorietat, son pas del gost de tot lo mond e se ne ressentirà tota sa vida.
Coneis la lenga dempuèi totjorn, coneis tanben los provèrbis e las legendas del canton, ausits dins la carrièra e dins lo campèstre, pendent son enfància coma pendent sa carrièra de prèire. S'assaja d'ora a la versificacion en francés, en occitan emai en latin e tota sa vida durant sentís lo besonh d'escriure. Es aital qu'en 1874, presenta a l'escasença del Ven centenari de la mòrt de Petrarca a Avinhon un sonet en occitan que serà coronat. Rescontra alara Mistral, Roumanille, Aubanel e d'autres felibres que l'encoratjan a contunhar. En 1976 es elegit Majoral del Felibritge (« Cigala del Lemosin »). Participa a las fèstas latinas de Montpelhièr en 1878.
Dempuèi las annadas 1870, Joseph Roux es largament publicat dins las revistas localas de Corresa, mas pas solament, e sos escriches en francés e en occitan son coneguts dels legeires de revistas coma la Revue des Langues Romanes, la Revue Lyonnaise, la Revue du Monde Latin, la Revue félibréenne, la Gazette d'Augsbourg e d'autras encara. Dins la Revue des Langues Romanes, son estats publicats entre autres los primièrs episòdis de son « epopèa », la Chansou Lemouzina, que seràn recompensats en 1882 del ramèl vèrd de laurèl a Montpelhièr.
La Chansou Lemouzina, publicada en 1889, es compausada de vint-e-quatre poèmas lirics que cadun pintra un episòdi de l'istòria o del legendari del bas Lemosin dempuèi lo sègle V fins al sègle XIX (de notar que l'eroïna de « Marguerite Chastang » es sa pròpria maire). Los felibres lemosins esiton pas a comparar Roux a Mistral, e la Chansou a Mirèïo o Calendal.
L'abat reçauprà mantuna autra recompensa al cors de sa carrièra, als Jòcs Florals d'Avinhon, Ate, Forcauquier o encara al concors de la Societat Arqueologica de Besièrs (medalha d'argent en 1877 e en 1878).
Sa literatura compta encara de poèmas, de faulas, una seria de Rustiques (tèxtes en francés que meton en scèna los usatges populars e las cresenças del Lemosin) per la màger part publicats dins la premsa o demorats manescriches. Se pòdon apondre d'enigmas e provèrbis collectats e publicats.
En 1893 participa a la creacion de l'Escòla Lemosina a Briva e ne ven lo capiscòl. La societat parisenca la Ruche Corrézienne ven de se crear tanben e sos sòcis son en relacion estrecha amb los felibres de la província. Roux collabòra a la revista Lemouzi, organ de l'escòla. D'autras escòlas nàisson dins las vilas a l'entorn e fòrman una federacion d'escòlas lemosinas que Roux ne serà lo chaptal. La Santa Estela de 1895 s'organiza a Briva. Joseph Roux, admirat per son esperit combatedor, servís de figura tutelària a la renaissença lemosina portada per un grop de felibres entosiastes. Se pòdon nommar entre autres Sernin Santy (1850-1906), un dels fondators del felibritge lemosin e de la revista ; Johannès Plantadis (1864-1922), istorian e etnològ, animator de la Ruche Corrézienne a París ; Marguerite Genès (1868-1955), institutritz e poetessa ; Eusèbe Bombal (1827-1915), erudit, arqueològ e escrivan ; mai recentament Robert Joudoux (1939-2016), òme de letras, director de Lemouzi.
L'abat s'es investit d'ora dins çò que considerava coma un trabalh d'epuracion de la lenga necessari aprèp de sègles de degalhs causats per l'influéncia del francés, tant dins la grafia coma dins lo vocabulari. Estúdia de tèxtes ancians e en particular los tèxtes dels trobadors, pr'amor d'una origina lemosina istorica prestada als primièrs trobadors. Collècta tanben de matèria dins lo parlar de sos contemporanèus, provèrbis, enigmas (« sourcelages » segon son mot), legendas e autres. A partir de sas observacions, torna bastir una grafia inspirada de la dels tèxtes medievals e s'esfòrça de levar tot manlèu al francés.
Aquela tasca dona luòc d'una part a una Grammaire Limousine, que pareis primièr per tròces dins la revista Lemouzi abans de far l'objècte d'una edicion en 1895, e a un diccionari de l'ambicion del Tresor dóu Felibrige, la Lengua d'Aur, demorat a l'estat de manescrich. Dins una letra a Plantadis datada del 21 de febrièr de 19055, Mistral testimònia de sa reconeissença a Roux, per lo prèst de son manescrich coma contribucion al Tresor. D'unes comentators del trabalh de Roux lo veson coma un precursor, amb Auguste Fourès (1848-1891) emai amb Mistral, de la grafia elaborada per Antonin Perbosc (1861-1944) e Prosper Estieu (1860-1939). L'abat Joseph Salvat (1889-1972) ditz : « Çò que Mistral aviá entrevist, çò que Roux aviá entrepres, Estieu e Perbosc, nòstres mèstres de l'Escola Occitana, l'an realizat »6. Mas una tala entrepresa pòt pas far l'unanimitat, e Nesmy evòca los detractors acusant l'abat de crear una lenga literària e fictiva, que lo pòble poirà pas legir e comprene. Lo Felibritge lemosin sosten l'abat dins sa demarcha, los detractors son probablament puslèu de lemosins fòra lo Felibritge, o eventualament de mond, felibres o pas, fòra Lemosin. La grafia dicha mistralenca a fach son camin e es plan populara dins l'espaci occitan, adaptada d'aicí d'alai dins son aplicacion. Pasmens l'abat Roux es encara a l'ora d'ara retengut coma un dels actors de la construccion grafica de l'occitan.
1-« Joseph Roux et la renaissance limousine », Lemouzi, 1905, p. 75. Joseph Nouaillac (1880-1947) foguèt professor e istorian especialista del Lemosin.
2-Paul Mariéton (1862-1911), poèta, felibre, fondator de la Revue Félibréenne.
3-L'Intransigeant, 22 d'abril de 1901, pp. 1 e 3.
4-La Revue hebdomadaire, 1905, n°27, pp. 167-195. Jean Nesmy es lo pseudonim de Henry Surchamp (1876-1959), escrivan regionalista.
5-Reproducha dins Lemouzi, 1905, p. 102.
6-Lo Gai Saber, numero especial, abril de 1934, n°114, p. 379.
- Hymnes et poèmes en l'honneur de la Vierge Marie, Putois-Cretté, Paris, 1865.
- Pensées (maximes, études, idées), 1866.
- Sourcelages lemouzis : Énigmes limousines, Maisonneuve, Paris, 1877.
- Proverbes bas-lemouzis, E. Karras, Halle, 1883. Véser la ressorsa en linha sus Occitanica.
- Pensées, A. Lemerre, Paris, 1885.
- Nouvelles Pensées, A. Lemerre, Paris, 1887.
- La Chansou Lemouzina, A. Picard, Tulle, 1889.
- Grammaire Limousine, Lemouzi, Brive, 1895.
- Fablas tulencas, manescriches de la Société des Langues Romanes conservats a la Bibliotèca Interuniversitària de Montpelhièr, H 672-01. Véser la ressorsa en linha sus Occitanica.
- Lou Grand Flourege, sonet, manescriches de la Société des Langues Romanes conservats a la Bibliotèca Interuniversitària de Montpelhièr, H 672-02. Véser la ressorsa en linha sus Occitanica.
- Transcripcion d'un tèxt del sègle XV, extrach de l'ancian fons de la Catedrala de Tula. Manescriches de la Société des Langues Romanes conservats a la Bibliotèca Interuniversitària de Montpelhièr, H637-01. Véser la ressorsa en linha sus Occitanica.
- Fons Joseph Roux (10 F) dels Archius Departamentals de Corresa, que conten entre autre lo diccionari del bas-lemosin en mantun volum La Lengua d'Aur. Véser l'inventari numeric sul site dels archius.