Écrivain, félibre et journaliste languedocien. Militaire puis administrateur colonial au Tonkin où il réside de 1886 jusqu’à sa mort prématurée en 1897, des suites de sa consommation intense de l’opium. Il a utilisé deux langues – le français et le provençal rhodanien – comme vecteurs d’une production artistique, tant en prose qu’en vers, qui trouvera essentiellement en Indochine sa terre d’inspiration.

Identité

Formes référentielles

Boissière, Jules (1863-1897)

Autres formes connues

- Boissière, Juli (forme occitane du nom)

- Khou-Mi (pseudonyme)

Éléments biographiques 

Né le 17 avril 1863 à Clermont-l’Hérault, rue Croix-Rouge, Jules Boissière effectue une brillante scolarité à Montpellier puis à Paris (classe de rhétorique supérieure au lycée Henri IV), où ses parents et sa sœur se sont installés. Particulièrement doué en langues, il commence à s’initier au journalisme en collaborant au journal radical-socialiste de Clémenceau La Justice. C’est à la même époque qu’il se met à fréquenter le Paris de la fin du Parnasse, des Décadents et des Symbolistes. Il n’a que vingt ans lorsqu’est publié chez Lemerre – l’éditeur parnassien par excellence – son premier recueil de poésies Devant l’énigme où l’on sent particulièrement l’influence de Mallarmé, l’un des auteurs qui l’accompagnera tout au long de sa brève vie.
Au lendemain de la défaite de 1870, de nombreux poètes continuent d’être tentés par le voyage en Orient  et par le goût de l’aventure, voire de l’héroïsme… Jules Boissière, comme Rimbaud et Loti en tête de toute une génération, ne fait pas exception à la règle et se laisse aller à des rêves de départ et de lointains voyages... Pourtant, ses racines provençales ne sont jamais bien loin – comme on peut le constater à la lecture de son deuxième recueil Provensa ! (1887) – et se retrouvent renforcées par la fréquentation des félibres parisiens du café Voltaire, parmi lesquels Alphonse Daudet, Clovis Hugues, Charles Maurras et Paul Mariéton avec lesquels il nouera des liens amenés à perdurer. Il devient très vite le secrétaire de la Société des Félibres de Paris et est invité par Valère Bernard à venir en Provence où il rencontre Frédéric Mistral. C’est sans doute l’époque de la naissance de son amour pour Thérèse Roumanille, fille du célèbre primadié, qui vient d’être choisie à Hyères comme nouvelle reine du Félibrige. Aimer une « reine », qui plus est fille d’un ardent polémiste royaliste, pas toujours très tolérant envers les agnostiques, n’était assurément pas chose aisée ! Le poète écrit désormais, le plus souvent sans signature, des chroniques parlementaires dans des journaux d’obédience radical-socialiste et volontiers anticléricale, tels que le quotidien héraultais Le Petit Méridional. C’est en 1886, pour des raisons qui demeurent encore partiellement obscures – mais qui ont sans doute un lien avec l’abandon de Louis-Edouard Boissière, père de l’auteur, du domicile conjugal et avec les difficultés financières qui s’en suivent –, qu’il prend le parti de s’expatrier et de voir du pays. Justement, le Tonkin vient d’être transformé en colonie française et l’Annam est sous protectorat français depuis 1874 : tour à tour secrétaire de Paulin-Alexandre Vial, résident général en Annam et au Tonkin, puis surtout de Paul Bert, gouverneur civil de l’Annam et du Tonkin dont il devient le commis de résidence, Jules Boissière effectue en Indochine son service militaire, combat – puisque la conquête n’est alors pas encore terminée –, apprend l’annamite et lit 3000 caractères de chinois puis devient fonctionnaire dans le corps des administrateurs. Collaborateur d’Ernest Constans, nommé en 1887 gouverneur général, il devient alors ce poète provençal en Indochine qui s’installe à Binh-Dinh puis à Qui-Nhon, visite tout le pays nouvellement conquis, Calendau de Mistral sous le bras et sa bibliothèque toujours prête à le suivre en brousse. Depuis le Tonkin, il ne cesse de correspondre avec l’auteur de Mirèio puis, plus tard, avec Mallarmé. Il écrit alors toute une œuvre poétique en provençal, recueillie et traduite post-mortem par son épouse sous le titre Li Gabian (Les Goëlands).

Dans un premier temps, sa nostalgie de la terre de Provence prend le pas sur l’attirance pour le paysage environnant, son peuple et ses coutumes. L’écriture coloniale obéit chez lui à un lent processus de maturation qui semble parallèlement correspondre à sa progression dans l’échelle administrative et à sa rencontre avec l’opium.
C’est, de fait, avec ses seuls Propos d’un intoxiqué, récit publié à Hanoï en 1890 – sous le pseudonyme de Khou-Mi, gardien de pagode – et plusieurs fois réédité, qu’il se fait un nom parmi ces écrivains de l’opiomanie en vogue à la fin du XIXe siècle.
Devenu un administrateur brillant, tout auréolé de ses succès indochinois, il rentre en France pour sa première permission. Il peut désormais prétendre à la main de Thérèse Roumanille, qu’il épouse en l’église Saint-Agricol d’Avignon, le 17 avril 1891, puis ramène en Indochine l’année suivante.
Alors même que la vie semble lui sourire, il n’écrit curieusement plus en provençal et il faut attendre son dernier séjour en France, en 1896, pour qu’il rédige ses cinq derniers poèmes dans la langue de Mistral. Entre-temps, il est devenu en Indochine un homme d’action pour lequel l’écriture en prose devient le vecteur principal de la production littéraire. Il prend alors la direction de La Revue Indochinoise qui publiera, au-delà de la disparition de son fondateur, les principaux auteurs français d’Indochine. C’est l’époque où Boissière écrit certains de ses textes les plus forts et les plus influencés par sa vie d’aventurier, de soldat et de haut-fonctionnaire du Tonkin, tous publiés chez Flammarion en 1896 dans le recueil Fumeurs d’Opium : Dans la forêt, La prise de Lang-Xi, Comédiens ambulants, Le blockhaus incendié, Les génies du mont Tân-Vien, Une âme, Journal d’un fusillé.
Le 12 août 1897, à peine retourné à Hanoï, en qualité de vice-résident, il meurt brutalement d’une occlusion intestinale (sans doute due à sa fréquentation assidue des fumeries d’opium…). Il a 34 ans. Pour respecter sa volonté, sa dépouille n’est pas ramenée sur le sol français et il est enterré au cimetière d’Hanoï. Sur sa stèle ne figurent que son nom et ses dates de naissance et de mort.

Engagement dans la renaissance d’oc

Contrairement à ce que pourrait le laisser croire une lecture trop rapide de sa biographie, Jules Boissière demeure nostalgiquement et sensoriellement attaché, tout au long de sa brève vie, à la Provence et à la langue rhodanienne telle que codifiée par Roumanille, Mistral et leurs compagnons. Si on ne trouve pas trace dans sa production d’une expression en dialecte languedocien usité à Clermont – quoiqu’il appelle à la cultiver dans sa critique d’un ouvrage de A.P. Fleury-Geniez, Histoire populaire de la ville de Clermont-L’Hérault rédigée, pour La Revue Félibréenne de mars 1886 – c’est sans doute parce que chez lui, au sein d’une famille très bourgeoise, on est assez éloigné de la langue d’Oc. De fait, l’attachement à la langue provençale sera davantage le fruit d’une démarche intellectuelle – voire élitiste – et s’exprimera dès la préface de Provensa ! (1887), son deuxième recueil de poésies, toutes écrites en français, où il écrit, non sans une nostalgie de circonstance : « Mais à courir les chemins, je me suis épris de la Terre, et surtout de notre terre à nous, l’antique Provensa dont le nom, jeté de l’Océan aux Alpes, rallia nos aïeux contre Montfort ».
C’est la fréquentation à Paris des félibres du café Voltaire, puis l’invitation de certains d’entre eux à venir séjourner en Provence, qui pousse Boissière à écrire en vers provençaux. Parmi ses nombreuses contributions aux divers organes officiels du Félibrige (L’Armana prouvencau et La Revue Félibréenne essentiellement), il faut relever 5 poèmes qui reparaîtront, à titre posthume, dans le recueil Li Gabian (1899) et dans lesquels s’exprime déjà l’inspiration provençale de l’auteur : Partènço où l’on trouve l’idée – empreinte d’un souffle épique – de l’exil du peuple provençal opprimé ; Li Plagnun dou Tambourinaire où le vieux joueur préfère rester seul, à l’écart, plutôt que de faire ou de voir danser les jeunes filles avec les étrangers venus du nord ; Au Comte Gastoun De Ravousset-Bourboun, aventurier provençal fusillé au Mexique en 1854, qui permet de retrouver une âme héroïque ; La Campano et Au Païs de Prouvènço qui en appellent au réveil de la jeunesse et de la Patrie provençale.
Un soir de 1885, dans le cadre splendide du plateau du Cheiron (Alpes-Maritimes), il tente de créer, en compagnie d’autres félibres de la nouvelle génération, Valère Bernard, Louis Funel et Frédéric Amouretti, une fédération de la jeunesse patriote provençale : Lou Roble  di Jouve. L’entreprise, pas vraiment encouragée par Mistral, s’arrête vite, mais on en retrouvera la trace, quelques années plus tard, dans la Déclaration des jeunes félibres fédéralistes du 22 février 1892 soutenue mais non signée par Boissière, alors au Tonkin.
Mais c’est sans doute la période indochinoise – en particulier les années 1887-1888, puis 1896, après le dernier séjour en France – qui constitue chez lui un creuset essentiel au développement d’une sensibilité et d’une écriture occitane renouvelée. À côté de quelques pièces où s’expriment des regrets déchirants et le désir du retour (I Proumiè Felibre et I jouini Felibre), c’est bien une renaissance poétique que Boissière connaît sur la terre d’Annam : écrits en langue d’Oc mais prenant pour thème des sujets indochinois ou asiatiques, sans ajout d’exotisme à bon marché, certains de ses poèmes permettent alors au côté provençal de s’exprimer avec force et comptent parmi les plus beaux de l’auteur : Pantai di belli fiho, Lou Bouddha, Retra de Chineso, Cementèri d’Annam, En Barquet, Souto li tourrè d’argènt, Après la bataio
Avec le 1er retour en Provence (1891), son vers se fait souvent plus lyrique et laisse percer l’émotion derrière le costume du troubadour – si l’on en juge par les vers de l’époque du mariage avec Thérèse Roumanille – jusqu’à créer le vers halluciné et parfois amer de 1896, année qui est également celle de la parution du recueil Fumeurs d’opium. La vision est désormais pénétrante, morbide et le style a pris une ampleur allant bien au-delà de tout néo-exotisme.
Des vers d’épithalame d’A-N-Uno Rèino, célébrant le retour du Prince lointain, on se retrouve ainsi avec un vers enfiévré : Lou Félibre Canto (la roumanso à sa Réino), chant d’un pur lyrisme, suivi par Lou Félibre raconto (coume arribè que soun Cors e soun Amo, las d’avè cerca’n van l’Amour e la Muso, s’entournéron au vilage patriau, mounte se repauson de la Vido emai di Sounge) et Lou Félibre raconto (ço qu’a vist is enfèr dins la fourèst enmascarello) puis, enfin, par Mar e Sereno (Avignon, 5 mars 1896) où le poète, las de la réalité, se berce d’imaginations et dispose désormais d’une maîtrise supérieure de son instrument.
Le fantastique et le symbolisme ne sont pas absents de la production poétique de cette dernière époque et d’étranges figures (de Cléopâtre à Messaline, de Salomé à la Borgia, en passant par Isabeau, Marguerite, Hélène et la Lorelei de Heine, même non directement citée…) peuplent ces vers d’où l’opium n’est sans doute guère éloigné…

Bibliographie de l'auteur

Voir les publications occitanes de Jules Boissière référencées dans 
Le Trobador, catalogue international de la documentation occitane

Œuvres littéraires de Jules Boissière

- Devant l’énigme, poésies (1879-1883), Paris, Alphonse Lemerre, 1883

- Propos bourguignons sur trois sonnets in Causeur bourguignon n° 48, 9 novembre 1884

- Provensa ! poésies (1884-1885), Paris, Alphonse Lemerre, 1887

- Le Carnet d’un soldat in L’Avenir du Tonkin, 1889 (inséré dans Fumeurs d’opium sous le titre Carnet d’un troupier)

- Le Bonze Khou-Su, Hanoï, François-Henri Schneider, 1890 (sous le pseudonyme de Jean Rodde)

- Propos d’un intoxiqué, imprimerie de L’Avenir du Tonkin, 1890 (sous le pseudonyme de Khou-Mi, gardien de pagode) puis Paris, Louis Michaud, 1911(incluant Le Bonze Khou-Su, Terre de fièvre, Cahier de route)

- Fumeurs d’opium (comprenant Dans la forêt, La prise de Lang-Xi, Comédiens ambulants, Le blockhaus incendié, Les génies du mont Tan-Vien, Carnet d’un troupier, Une âme. Journal d’un fusillé) Paris, Flammarion, 1896

- Li Gabian (Les Goélands), recueil des poésies provençales de Jules Boissière traduites littéralement en français par Mme Boissière, Avignon, Joseph Roumanille, 1899

- Lou Souto-Prefét, poème inclus dans « Flourilege Prouvencau » (« Anthologie Provençale ») par J.Bourrilly, A.Esclangon et P.Fontan, Escolo de la Targo, Toulon, 1909, p.192-194

- Pèr Mounto-Davalo, texte en prose inclus dans L’Armana prouvençau de 1889, p. 95-97

- Li Pàuri Coumedian, texte en prose inclus dans L’Armana prouvençau de 1897, p. 66-70.

- La Congaï, poème inédit cité intégralement par Victor Le Lan in « Essai sur la littérature Indochinoise », Les Cahiers Indochinois, Hanoï, 1907

- Ailes et Fumées, poème inédit dédicacé à Albert de Pouvourville sur son exemplaire de Fumeurs d’opium, publié dans La Dépêche Coloniale Illustrée, 31 juillet 1909

- Cahiers de route, pages inédites in Mercure de France n° 344, mai 1911

- L’Indo-Chine avec les français, Paris, Louis Michaud, 1913

- Peno De Gabian (Plumes De Goéland, extraits de Li Gabian), l’Astrado, Toulon, 1977

- Dans la forêt et La prise de Lang-Xi in Indochine, Un rêve d’Asie, Omnibus, 1995 – Réédition en 2000

- Fumeurs d’opium (comprenant Comédiens ambulants, Les génies du mont Tan-Vien et autres nouvelles), Kailash, Paris, 1993 et 2005

- Opium (textes choisis 1885-1895), Magellan et Cie, Paris, 2007

Correspondances

- Correspondance Jules Boissière-Frédéric Mistral. Musée bibliothèque Mistral de Maillane (série 31/44 à 31/80)

- Correspondance Jules Boissière-Stéphane Mallarmé. Documents Stéphane Mallarmé III, présentés par Carl Paul Barbier, Paris, Nizet, 1971

- Correspondance Jules Boissière- Marie Louise Boissière (née Rodde), 1886-1892, Médiathèque Ceccano, Avignon (Microfiche 239, ms 6052)

Collaboration de Jules Boissière à divers journaux, revues, rapports…

Le Petit Méridional, Journal Républicain Quotidien (1883-1886)

- La Justice (1884-1886)

- La Revue Félibréenne (1885-1898)

- L’Armana Prouvençau (1889-1897) : Pèr Mounto-Davalo (numéro de 1889, p. 95-97), À la bèllo eisservo (numéro de 1897, p. 51-52), Li Pàuri Coumedian (numéro de 1897, p. 66-70) Les autres textes en vers ont été recueillis dans le recueil Li Gabian. Les quelques contes en prose que J.Boissière écrivit pour L’Armana n’ont jamais été recueillis.

- La Revue Verte « Monde, littérature, beaux-arts, finance » : Au Tonkin (25 novembre 1886) et Poésies : La vision de Montfort et Village Provençal (25 février 1887)

- Chimère, Revue de littérature et de critique indépendante : Ac-Koï, Tonquin (n° 20, mai 1893-introuvable)

- L’Avenir du Tonkin (1886-1897) : Par la Brousse (publié sous le pseudonyme de Khou-Mi, gardien de pagode), 14 mai 1890

- Courrier d’Haïphong : Une âme, journal d’un fusillé (2 mars 1893, sous le pseudonyme de Jean Robert)

- La Revue Indochinoise (1893-1897)

- Le XIXème Siècle, Journal Républicain Conservateur (années ?)

- L’Écho de Paris (années ?)

- Le Temps (années ?)

- Le Soleil (années ?)

- Rapport général sur le châu de Bach-Tong, Journal Officiel de l’Indochine française, 5 septembre 1889 (2ème partie Annam-Tonkin, p.666)

- Situation de l’Indochine française au commencement de 1894 (Rapport administratif anonyme… mais dédicacé au couple Boissière…), Hanoï, François-Henri Schneider, 1894, Bulletin de l’Ecole française d’Extrême-Orient, vol.13, (p.90), 1913

Travaux universitaires relatifs à Jules Boissière

- Nguyen Manh Tuong, L’Annam dans la littérature française-Jules Boissière. Thèse complémentaire pour le doctorat en lettres (228 p.), 1 vol., Université de Montpellier, faculté des lettres, 1932

- Jean-Yves Casanova, Estrangié pèr li viéu, estrangié pèr li mort : « entre deux » du temps et de l’espace dans la poésie de Jules Boissière », Amb un fil d’amistat. Mélanges offerts à Philippe Gardy, Toulouse, Centre d’Étude de la Littérature Occitane, 2014, p. 267-296.

Monographies, notices biographiques et articles sur Jules Boissière et son œuvre

- Charles Maurras, « La vie littéraire : deux voyageurs, M. Ouvré, M. Boissière », Revue Encyclopédique, 14 octobre 1896

- Jean Dream, « Boissière », L’Avenir du Tonkin, 18 août 1897

- René Dorsan, « Notice sur Jules Boissière », La Provence illustrée, 15 mai 1900

- Paul Mariéton, « Jules Boissière », La Revue Félibréenne, t. XIII, fascicule pour 1897, Paris, 1898

- Paul Mariéton, « Notice sur Jules Boissière », La Revue Félibréenne, 1907 

- Victor Le Lan, « Essai sur la littérature Indochinoise », Les Cahiers Indochinois, Hanoï, 1907

- Albert Maybon, « Jules Boissière », Revue Indochinoise, 2ème semestre 1910

- Jean Ajalbert, préface à Propos d’un intoxiqué, Paris, Louis Michaud, 1911

- René Crayssac, « Essai sur la vie et l’œuvre de Jules Boissière », Revue Indochinoise, juillet-août 1912- p.24-59.

- Eugène Pujarniscle, « La philosophie de Jules Boissière », Revue Indochinoise, janvier 1918- p.1 à 44.

- Albert de Pouvourville, « L’opium » - Conférence donnée le lundi 1er juin 1908 au siège du Congrès, Comité des congrès coloniaux français (parue dans Propos d’un intoxiqué, Paris, Editions Zanzibar, 1995

- Albert de Pouvourville, Chasseur de Pirates !..., Aux Editeurs associés, 79 bis rue de Vaugirard, Paris, 1923.

- Félix Bertrand, Félix Gras et son œuvre (1844-1901), Li Gabian de Jules Boissière, Aix-en-Provence, Les Editions du « Feu », 1935

- Farfantello (pseudonyme d’Henriette Dibon), Juli Boissière in Visage Felibren, Edicioun dou Porto-Aigo, Aix-en-Provence, 1935

- Postface de Jean-Philippe Geley à Fumeurs d’opium, Paris, Kailash, 1993

- Préface d’Émilie Cappella à Opium (textes choisis 1885-1895), Magellan et Cie, Paris, 2007

- Patrick Leblanc, « Jules Boissière (1863-1897). Le Malentendu », in Semeurs de signes, passeurs de sens… Des Poètes en Languedoc, Béziers, Arcadia, 2012, p. 11-23

- Jean-Yves Casanova, préface à Dans la forêt in La Revue Littéraire n° 57, avril-mai 2015

Ouvrages et articles sur le Félibrige et son temps faisant référence à Jules Boissière

- Ernest Gaubert et Jules Veran, Anthologie de l’Amour Provençal, Paris, Mercure de France 1909

- Jules Charles-Roux, Des Troubadours à Mistral, François Seguin, Avignon, 1917 (incluant la célèbre lettre de Mistral à Boissière du 14 septembre 1885 sur le système fédéral)

- Jean Ajalbert, L’En-Avant de Frédéric Mistral, Paris, Denoël et Steele, 1931

- Émile Ripert, La librairie Roumanille, Lyon, S.A de l’imprimerie A. Rey, 1934

- Michel Courty, « Peno de gabian » de Juli Boissiere, in Lou Liame, Revue de Culture Provençale de l’Escolo Dou Dragoun n° 68, Draguignan, 1978

- Jacques Thibert, Georges Granier, « Jules Boissière », in Bulletin du Groupe de Recherches et d’Etudes du Clermontais (G.R.E.C), n° 59-60, avril-juillet 1991

- Charles Maurras, Barbares et Romans, Les Félibres, numéro spécial du journal La Plume, 1891.

- René Jouveau, Histoire du Félibrige (4 vol., en particulier vol.2 « 1876-1914 »), Nîmes, 1970.

- Victor N’Guyen, « Maurras et le Félibrige : éléments de problématique » in La France Latine, n°78-79, 1979 (cite la lettre de Jules Boissière à Paul Mariéton du 3 août 1892 à propos de la déclaration des félibres fédéralistes)

- Victor N’Guyen, Aux origines de l’Action Française-Intelligence et politique autour des années 1900, Paris, Fayard, 1991.

- Philippe Martel, Les Félibres et leur temps-Renaissance d’oc et opinion (1850-1914), Presses Universitaires de Bordeaux, 2010


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Rémi Jumeau, poète, romancier, défenseur de la langue, a publié une dizaine d’ouvrages en occitan (provençal).

Identité

Formes référentielles

Rémi Jumeau

Autres formes du nom

Romieg Jumèu

Romieg Jumeau

Éléments biographiques

Rémi Jumeau est né le 30 avril 1930 à Marseille (13).

Il débuta ses études chez les Jésuites, où enseignait son père, professeur de mathématiques. Mais il se rendit vite compte que les équations et les logarithmes n’étaient pas faits pour lui et il préféra entrer à l’Institution du Sacré Cœur où il brilla en histoire, en français, en latin et grec. Si bien qu’il obtint, à la fin de ses études secondaires, un diplôme d’éloquence dans la tradition antique la plus pure.
Il continua ses études aux Beaux-Arts de Marseille, dans la section sculpture, gravure et modelage. Cependant, malgré de vrais dons artistiques et l’espoir de consacrer sa vie aux Arts, il décida d’intégrer la société « Avenir Publicité » où il fit toute sa carrière.
Il en gravit peu à peu tous les échelons, jusqu’au poste de Directeur Régional qu’il occupa plus d’une fois, dans plusieurs régions de France, avant de terminer au siège de Paris.

Dans cette dernière partie de son cheminement professionnel, il s’investit dans les instances représentatives du métier pour faire aller de pair la publicité et la protection du patrimoine. Les textes qui régissent aujourd’hui les conditions de la publicité dans les paysages urbains et ruraux lui doivent beaucoup.

Marié une première fois avec Simone Moulierac, il eut deux enfants : Sylvie, née à Marseille en 1955 et Manuel, né à Saint-Quentin en 1961. Ce dernier, sur les traces de son père, est graveur.

Plus tard il rencontra Claire Morel, professeure de danse classique, qu’il épousa en 1986. Le long de leurs quarante ans de vie commune, ils partagèrent la passion des arts.

À la retraite il revint en Provence, acheta en 1995 un petit mas à Graveson (13), puis une maison de village à Eyragues (13), avant de s’installer à Avignon (84) où il acheva sa vie le lundi 10 janvier 2022. Il fut enseveli le vendredi 14 janvier dans la tombe familiale à Ménerbes (84).

Engagements dans la renaissance d’oc

Exilé tout au long de sa vie professionnelle, il détestait l’idée qu’il soit nécessaire, pour faire un bon citoyen français de le couper brutalement de sa culture d’origine. Toute sa vie il milita pour la cause occitane. À Graveson, dès son arrivée, il participa à la création de l’association « Un Païs per Deman » et fut un des fondateurs du CREDD’O en 2005, dont il devint le second président de 2008 à 2018. Sous sa direction, cet organisme prit une plus ample envergure. Dans ce cadre, il essaya, en 2009, de donner, avec d’autres, une coloration occitaniste à la campagne pour la promotion de Marseille comme capitale européenne de la culture (voir lettre en annexe).

Il fit partie du bureau de l’association « Les Suds » dès sa création en 1996.
Enfin, ce qui comptait le plus pour lui, il se consacra à l’apprentissage de la langue qu’il fut bientôt capable d’écrire. D’abord dans des chroniques pour la revue associative Deman un Païs, puis avec la publication d’une dizaine d’ouvrages touchant presque tous les domaines de la littérature : poésie, romans historiques ou d’aventure, nouvelles fantastiques… Il avait choisi de maîtriser un langage noble et exigeant, à la hauteur de la haute idée qu’il se faisait de la langue.

Bibliographie

Sénher quau, IEO Edicions, Colleccion Atots 2002

Cronicas imaginàrias, IEO Edicions, Colleccion Atots 2004

E siguèsse una nafra la lutz, IEO Edicions, Colleccion Messatges 2008

Pantòri, Romieg Jumèu IEO Edicions, Colleccion Atots 2013

Embolh a Malamosca, IEO Edicions, Colleccion Atots Crimis 2014

Apològs, IEO Edicions, Colleccion Messatges 2014

Nòvas d’autra part, IEO Edicions, Colleccion Atots 2015

Rèire vida, IEO Edicions, Colleccion Atots 2016

L’esclargiera, IEO Edicions, Colleccion Atots 2017

Lo viatge alambicant dau professor grosdenàs, IEO Edicions colleccion Atots 2018

La granda timonariá, IEO Edicions, colleccion Atots 2020. NB. L’auteur aurait souhaité corriger cet ouvrage et en publier une nouvelle version plus satisfaisante.

Sources



Archives familiales

NEUMULLER,Michel. Un quatuor d’écrivains occitans se met à table à Belcodène. Aquò d'Aquí [en ligne]. 2015. (Consulté le 18 juillet 2022). Disponible à l'adresse : https://www.aquodaqui.info/Un-quatuor-d-ecrivains-occitans-se-met-a-table-a-Belcodene_a841.html

NEUMULLER,Michel. Romieg Jumeau se's enanat.Aquò d'Aquí [en ligne]. 2022. (Consulté le 18 juillet 2022). Disponible à l'adresse : https://www.aquodaqui.info/Romieg-Jumeau-se-s-enanat_a2315.html

Lettre sur Marseille capitale de la culture



Annexes

Une lettre de Rémi Jumeau en 2009

Graveson, le 13 juillet 2009

Chers amis,

Vous avez accepté de participer à notre projet, visant à inscrire la Culture d’Oc dans l’opération Marseille/Provence, capitale européenne de la Culture 2013. D’ores et déjà, une quinzaine d’écrivains et d’universitaires nous ont, comme vous donné leur accord, avec enthousiasme. Maintenant, il importe que vous nous indiquiez le ou les thèmes que vous désireriez développer à cette occasion. Nous vous rappelons, pour que notre projet ait quelque chance d’être sélectionné, que les thèmes correspondent aux critères ci-après : (ceux-ci ayant été définis par le comité technique de l’association Marseille 2013)

1-Pour ce qui concerne « la dimension européenne »

-Renforcer la coopération entre les opérateurs culturels, les artistes et les villes des Etats membres concernés et d’autres Etats membres, dans tout le secteur culturel.
-Faire ressortir la richesse de la diversité culturelle en Europe.
-Mettre en évidence les aspects communs des cultures européennes.

2-Pour ce qui concerne « la Ville et les Citoyens »

-Encourager la participation des citoyens, habitant Marseille et la Provence, susciter leur intérêt ainsi que celui des citoyens vivant à l’étranger.
-Avoir un caractère durable et faire partie intégrante du développement culturel et social à long terme de la Ville et de sa Région.

3-Enfin, ne pas oublier la dimension méditerranéenne de Marseille/Provence, d’autant que la réalisation du Musée des Civilisations d’Europe et de la Méditerranée, le MUCEM, devrait être achevée en 2013.

Si un thème comme celui des immigrations de masse aux XIXe et XXe siècles (italienne, espagnole ou maghrébine) a déjà fait l’objet de nombreuses études, les migrations internes (par exemple, celle des gavots vers plaines ou les villes du littoral provençal) ou vers les pays voisins (par exemple des occitans vers l’Espagne après la Reconquista, des Vaudois provençaux vers l’Italie, ou des Gavots vers le Mexique) mériteraient des développements intéressants.

Les critères sont donc suffisamment larges, (notamment ceux de la diversité culturelle et des échanges méditerranéennes) pour offrir une grande liberté dans les choix des sujets.

En conclusion, nous vous demandons de nous adresser d’ici fin août, les titres des thèmes que vous comptez traiter, de manière à ce que nous puissions commencer à bâtir notre projet commun. Si 2013 est l’année de la mise en œuvre globale de l’opération, c’est en 2009 que se fait la sélection, d’où notre demande. Recevez chers amis nos cordiales salutations

Le Président, Rémi JUMEAU

Hommages rendus par Jean-Marie Ramier le jour des obsèques

Sus lou cros de Roumié (divèndre 14 de janvié 2022, à Menèrbo)

Roumié, vaqui un credo de belèu lou faras tiéu : Lou Crédo dé Cassian dóu grand pouèto Vitou Gelu, Marsihés coume tu. N’en vaqui quàuqui tros.

A peri tout entié, qué servirié de neisse !
Dieou, que li vi tan lun, nou forgé pas per ren :
En mouren regrian ; l’ome quan dispareisse,
Va pupla leis estèlo oou foun doou firmamen !

Maduro avan lou tem, ma testo, qué vies blanquo,
A glena quaouquei gran dedin chasque gara.
Mies qué lou marguiié que rounflo sus sa banquo
Ai souven tria de grame ei sermoun doou cura.
Dei prepaou dei moussu, dei cansoun dei femèlo,
Dei questien dei nistoun, surtou, mi sieou nourri :
Tan qu’un secrè nouveou coutiguo sa cervèlo
Lou senigran voou pa mouri
A peri tout entié, etc …

Dieou mandan sa semenço ei ciele, à l’avanturo,
Coumo lou bastidan qué sameno soun bla,
Lou gran s’esparpaié lon de la vouto bluro :
Qu s’enregué d’eici, qu s’enané d’eila.
Nouesto grano encapé de toumba su la terro :
Aqui rescountrerian noueste premié relès,
Mounte tan de doulou duvien nou fa la guerro
Jusqu’oou suari, despui lou brès !...
A peri tout entié, etc…

Mai lou darnié badaou pa pu leou nous escapo,
Sian saia aperamoun senso cro ni palan ;
Aven entamena nouesto segoundo etapo ;
Anan mai espeli su d’un globou pu gran !
Aqui sian dejà mies : aven lou cor de ferri,
Vin pan d’ooutou, lei bras emé lei ner d’acié ;
Creignen ni cirourgien, ni drogo, ni cristèri :
Counoueissen plu la maladié !
A peri tout entié, etc…

Adelà fourra plu qué tout un pople laoure
Per gava finqu’eis uei quaouquei pouar a l’engrai ;
Aqui l’ooura plus ges dé riche, ni de paoure ;
Ni saven, ni bestias ; ni beou pitoué, ni lai !
Seren toutei parié souto la memo bacho !...
Pu gai qué de jouven qu’an chima lou claré,
Oouren noueste bouenur escri dessu la facho,
Coumo s’erian oou cabaré !
A peri tout entié,etc…

A cin-cen-milo lèguo oou dessu dei tounerro,
Sé nou pren fantasié dé durbi lou journaou,
Li veiren lei travai que nouesto ancieno terro
Fara, per si servi dei forço dé l’uiaou,
Coumo l’aplooudirian, soun assaou dé couragi
Dei reire-pichoun-fieou é dei reire-nebou,
Qué voudran counqueri lei nieou à l’arrambagi,
S’à la fin n’en venien à bou !...
A peri tout entié, etc…

Alor dei bouenei gen fenira plu la festo !...
Mai lei tigre, dé qué si voudran rapela ?
Semblaran d’estrangié ! degun li tendra testo
Perqué viroun toujou l’aiguo dins sei vala !
Leisso leis arpagoun ti trata d’imbecile :
En ti fasen cheri, moougra tou soun mespres,
Vidaou, places tei foun mies qué lou pus abile :
Oou milo per cen d’interes !...
A peri tout entié, etc…

La jalousié deis ome é sei bruteis entriguo,
Coumo s’en truffaren, quan seren tou-puissan !
Per quaouquei pessu d’or s’escaloun à la biguo,
Trouvaren à manès lei mouloun de diaman !
S’à la retiro-puou derraboun d’espouleto,
Dé capeou galouna, dé mitro de satin,
Qué sera tout aco, senoun de pampaieto
Su d’un lai viesti d’arlequin !...
A peri tout entié, etc…

Mai alor qué bouenur d’ooublida la coulèro !
Dé jouï doou printem senso apranda l’iver !
Dé dire ei capouchin qu’esfraieroun ta mero :
Reveran, boufa-li su lei brasiéd’infer !
Dé dire à Madeloun, quan lou pies li ressaouto :
Din noou-milo an d’eici, gento caligneiris,
Coumo vui, per passien ti mangearai lei gaouto,
E toujou mordrai frui requis !
A peri tout entié, etc…

Mestre, t’ai amarra su l’ancro d’esperanço :
Vai acaba ta pleguo entre leis afama,
E quan oouras feni ta vido de soufranço,
Vene trouva Cassian ei péis embeima.
Doou calici dé feou poues escouela lei gouto :
T’ai coupa lou bastoun qué ti duou sousteni ;
Parti premié ; veiras mei piado su la routo ;
M’agantaras à l’embruni…
A peri tout entié, qué servirié de neisse !
Dieou, que li vi tan lun, nou forgé pas per ren :
En mouren regrian ; l’ome quan dispareisse,
Va pupla leis estèlo oou foun doou firmamen !

Nàni, Roumié, risques pas de peri tout entié. Bèn lou countràri !

Restaras dins nosto memòri. Nous-autre, Gravesounen, t’avèn couneigu poulemisto arderous dins la colo d’Un Païs pèr Deman ; pièi, e subretout, au CREDD’O. Lou CREDD’O que n’en fuguères un di foundadou emai un valènt cepoun. Lou CREDD’O que n’en prenguères un jour la presidènci e la gardères dès an de tèms. Dès an qu’an fa flòri. Souto ta beilié l’Oustau di Petit venguè lou centre de recerco e d’estùdi recouneigu, indefugible e respeta que couneissèn vuei. Lou meteguères dins soun lustre, ié dounères si letro de noublesso. Quouro la santa te n’aliuenchè fisicamen, sian li testimòni que countunières de te soucita de tout ço que se debanavo de bon o de pas tant bon au CREDD’O. Gravesoun te dis gramaci.

Mai es tout lou païs d’O que gardara peréu souvenènço de tu. Siés esta un parangoun de la recounquisto de la lengo. Nosto lengo l’aprenguères emé passioun e n’en venguères lèu un escrivan de trio. Publiquères dins l’afaire de vint an uno deseno d’oubrage, tóuti saluda pèr la critico. Quau n’en pòu dire autant ? Te siés avasta ‘mé bonur dins quàsi tóuti li relarg de la literaturo : pouesìo, rouman istouri o d’aventuro, nouvello fantastico… E tout acò en gaubejant un lengage noble e eisigènt, à l’auturo de l’idèio auto que te fasiés de la lengo. Siés d’aquéli qu’an vicu, qu’an tengu nosto lengo vivo.

Vuei, es en terro de Menèrbo que sian vengu te rendre óumenage, un terraire de memòri e de resistènci. Nàni, Roumié, t’óublidaren pas !


Il y a des moments que l’on pense ne jamais vivre, et puis inévitablement, inexorablement, ils arrivent. C’est le cas pour cette disparition qui nous réunit aujourd’hui : comment accepter que Rémi, cet homme puissant, cet homme magnifique, qui était la bonté et la générosité même, ce mari, ce père, ce grand-père qui semblait indestructible soit terrassé par l‘âge et la maladie et repose aujourd’hui devant nous.

Au nom de Claire, son épouse, de Sylvie, de Manuel, de Frédérique et d’Anaïs, je vous remercie d’être venus, parfois de loin, pour l’entourer une dernière fois. Et ayons une pensée pour Sylvie et Nicolas que le Covid empêche d’être avec nous aujourd’hui.

Claire m’a demandé de retracer rapidement le portrait et la carrière de Rémi : je l’en remercie, je mesure l’honneur qui m’est fait mais aussi la difficulté de la tâche. Je vais essayer...

Rémi Jumeau est né à Marseille le 30 avril 1930.

Dès sa première année il se distingue en recevant, avec une grande modestie, le diplôme d’honneur du concours des bébés de 1931 : c’était sans aucun doute une prédestination !

De son premier mariage avec Simone Mouliérac naîtront ses deux enfants

  • Sylvie née à Marseille en 1955 dont il se plaisait à dire que c’était la parfaite petite marseillaise, jusqu’à ce qu’elle quitte Marseille. Mais si elle en a perdu l’accent, elle n’en a pas perdu l’humour…
  • et Manuel, né à Saint-Quentin en 1961, ce fils dont il était très fier, et qui a repris le flambeau de son père puisqu’il est aujourd’hui graveur.



Rémi débutera ses études chez les Jésuites, où enseignait son père, éminent professeur de mathématiques. Mais très vite il comprit que les équations et les logarithmes n’étaient pas faits pour lui ; il préféra intégrer l’Institution du « Sacré-Coeur » où il excella en histoire, en français, en latin et en grec. Il obtint même, à la fin de ses études secondaires, un diplôme d’éloquence, dans la plus pure tradition antique.

Fait plus étonnant : au cours de son service militaire, alors qu’on ne lui connaissait aucun penchant particulier pour l’armée, le Maréchal des Logis Rémi Jumeau se vit décerner un Certificat de Bonne Conduite par le colonel commandant le 405e régiment d’Artillerie Antiaérienne. Comme quoi il était bon partout !

Il poursuivra ses études aux Beaux-Arts, dans la section Gravure. Mais malgré ses incontestables dons artistiques et son espoir consacrer sa vie aux Arts Plastiques, il décida d’intégrer la société « Avenir Publicité » au sein de laquelle il fera toute sa carrière.

Ce fut un excellent choix, car il en gravit progressivement tous les échelons, parvenant jusqu’au poste de Directeur Régional qu’il occupa à plusieurs reprises, dans plusieurs régions de France, avant de terminer au siège à Paris.

Dans cette dernière partie de son parcours professionnel, il s’investit au sein des instances représentatives de la profession pour faire cohabiter la publicité et la défense du patrimoine. Les textes qui régissent aujourd’hui les conditions de publicité dans les paysages urbains et ruraux lui doivent beaucoup.

Lors de son départ d’Avenir Publicité, que la Direction générale a essayé de retarder autant que possible, un grand hommage lui a été rendu au Petit Palais à Paris par le Président Mr Boutinard-Rouelle.

C’est dans le cadre de son activité qu’il a rencontré Claire, qu’il a épousée en 1986 et avec laquelle il partagea quarante années d’un amour inconditionnel. Ils étaient réunis par l ‘amour des arts, lui la peinture et l’écriture, elle la danse et la musique.
Il hérite à cette occasion d’une nouvelle fille, Frédérique, qu’il considérait comme la sienne et qui l’adopta comme père.
Cerise sur le gâteau lui arriva Anaïs, sa petite fille, sa « petitoune » avec laquelle il avait une relation profonde, tendre, faite de multiples touches de complicité.

Bien qu’enrichi par ses voyages en France, et peut-être justement du fait de ses nombreux changements de résidence, il n’avait qu’une hâte dès sa retraite : retourner dans sa chère Provence. Lui le provençal convaincu n’a jamais accepté que la République, pour fabriquer un citoyen uniforme sur tout le territoire, ait combattu les cultures régionales : dès lors il a consacré sa vie à militer pour la cause provençale.
C’est la présidence du CREDD’O d’où il n’a cessé de lutter pour rendre sa dignité et sa place à la langue d’Oc.
C’est la participation au bureau de l’Association les Suds dès sa création en 1996.
C’est enfin l’Association du Festival d’Arles, « Les musiques du Monde », dont il fut le Président pendant dix ans.

Enfin et surtout, et c’était sans doute sa plus grande fierté, Rémi a pris sa plume pour écrire plusieurs livres en langue provençale, tous publiés.
Lui qui parlait peu, qui aimait aller à l’essentiel, qui était avare de ses mots et pudique sur ses sentiments, était prolixe dans ses écrits…
Selon un proverbe africain, continent où domine la culture orale, « un homme qui meurt c’est une bibliothèque qui brûle ». Pour Rémi c’est tout l’inverse : il nous laisse sa bibliothèque en provençal comme un témoignage ineffaçable.

Deux traits enfin que je voudrais souligner.

D’abord la fidélité et la profondeur de ses sentiments pour ses proches, qu’il aimait avec une égale tendresse et dont il ne s’est jamais départi.
Ensuite l’étendue impressionnante de sa culture : à ses côtés, on se plaisait à ne pas consulter Wikipédia quand on avait une question, assurés qu’il en connaissait la réponse.
Ce qui s’avérait toujours exact ! Rémi était une encyclopédie ambulante.

Mais si c’était un grand homme, calme, tranquille quoique souvent angoissé, pudique, digne c’était aussi – et là je laisse le mot de la fin à sa fille, un homme têtu comme 36 mules !

Merci, Rémi, pour tout ce que tu nous as donné, merci pour ce que tu étais, ta trace ne s’effacera jamais. Repose en paix.

Auteur de l'article

Jean-Marie Ramier, enseignant à la retraite d’Occitan-Langue d’Oc, dans l’enseignement catholique et dans l’Académie d’Aix-Marseille. Président des associations Un Païs pèr Deman, CEPD’OC (Centre d’Étude de la Parole d’Oc), membre du conseil d’administration du CREDD’O (Centre de Rencontre, d’Étude, de Documentation et de Diffusion d’Oc).

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Romieg Jumeau, poèta, romancier, aparaire de la lenga, a publicat un desenat d’obratges en occitan provençau.

Identitat

Formas referencialas

Rémi Jumeau

Autras formas conegudas

Romieg Jumèu

Romieg Jumeau

Elements biografics

Romieg Jumeau nasquèt lo 30 d’abriu de 1930 a Marselha (13).

Romieg entamenèt seis estudis en cò dei Jesuistas, ont ensenhava son paire, professor de matematicas. Mai pron lèu s’avisèt que leis equacions e lei logaritmes èran pas fachs per eu ; estimèt mai de rintrar a l’Institucion dau Sacrat Còr onte faguèt miranda en istòria, en francés,en latin amb en grèc. Ben tant que daverèt, a la fin de seis estudis segondaris, un diplòma d’eloquéncia dins la mai pura dei tradicions anticas.
Contunhèt seis estudis ai Bèleis-Arts de Marselha, dins la seccion Escultura, Escrinceladura e Modelatge. Pasmens, mau-despieg sei vertadiers dons artistics e son espèr de consacrar sa vida ais Arts, decidèt d’integrar la societat « Avenir Publicité » onte faguèt tota sa carriera.
N’escalèt pauc a cha pauc totei leis escalons, fin qu’au pòste de Director Regionau qu’ocupèt mai d’un còp, dins mantuna region de França, avans d’acabar au sèti de París.

Dins aquela darriera partida de son caminament professionau, s’investiguèt au dintre deis instàncias representativas dau mestier per faire anar cotria la publicitat e l’aparament dau patrimòni. Lei tèxts que bailejan uei lei condicions de publicitat dins lei païsatges urbans e ruraus li son pron devents.

Maridat un promier còp amb Simòna Moulierac, aguèt dos enfants : Silvia, nascuda a Marselha en 1955 e Manuèl, nascut a Saint-Quentin en 1961. Aqueu d’aquí, sus lei peadas de son paire, es ara escrincelaire.

Pus tard rescontrèt Claire Morel, professora de dança classica, qu’esposèt en 1986. Visquèron ensèms quaranta ans de temps e partejèron la passion deis arts.

A la retirada s’entornèt en Provença, crompèt en 1995 un pichòt mas a Graveson (13), puèi un ostau de vilatge a Eiragas (13), avans de plantar cavilha en Avinhon (84) onte acabèt sa vida lo diluns 10 de janvier de 2022. Foguèt sepelit lo divendres 14 de janvier dins son cròs de familha a Menèrbas (84).

Engatjament dins la renaissença d’oc

Despatriat tot de lòng de sa vida professionala, aviá en òdi l’idèia que per fargar un bòn ciutadan francés lo fauguèsse desmamar de sa cultura terradorenca. Tota sa vida militèt per la causa occitana. A Graveson, tre son arribada, participèt a la creacion de l’associacion « Un Païs per Deman » e fuguèt un dei fondadors dau CREDD’O en 2005. Dau CREDD’O ne’n foguèt lo segond president de 2008 a 2018. Sota sa bailiá aquel organisme prenguèt son ample.
Dins aquest encastre, ensagèt, en 2009, de donar, amb d’autres, una coloracion occitanista a la campanha per la promocion de Marselha coma capitala europenca de la cultura.

Faguèt partida dau burèu de l’associacion « Les Suds » tre sa creacion en 1996.
Enfin, çò que comptava lo mai per eu, se gropèt a l’aprendissatge de la lenga ben tant que foguèt lèu capable de l’escriure. Promier dins de cronicas per la revista associativa Deman un Païs, puèi amb la publicacion d’una desena d’obratges tocant quasi totei lei relargs de la literatura : poesia, romans istorics ò d’aventura, novèlas fantasticas… Aviá causit de gaubejar un lengatge nòble e exigent, a l’autura de l’idèia auta que se fasiá de la lenga.

Bibliografia e ressorças

Sénher quau, IEO Edicions, Colleccion Atots 2002

Cronicas imaginàrias, IEO Edicions, Colleccion Atots 2004

E siguèsse una nafra la lutz, IEO Edicions, Colleccion Messatges 2008

Pantòri, Romieg Jumèu IEO Edicions, Colleccion Atots 2013

Embolh a Malamosca, IEO Edicions, Colleccion Atots Crimis 2014

Apològs, IEO Edicions, Colleccion Messatges 2014

Nòvas d’autra part, IEO Edicions, Colleccion Atots 2015

Rèire vida, IEO Edicions, Colleccion Atots 2016

L’esclargiera, IEO Edicions, Colleccion Atots 2017

Lo viatge alambicant dau professor grosdenàs, IEO Edicions colleccion Atots 2018

La granda timonariá, IEO Edicions, colleccion Atots 2020. NB. Aquest obratge, l’auriá vougut corregir e ne’n tornar publicar una version mai satisfasenta.

Sorsas



Archius de familha

NEUMULLER,Michel. Un quatuor d’écrivains occitans se met à table à Belcodène. Aquò d'Aquí [en linha]. 2015. (Consultat lo 18 de julhet de 2022). Disponible a l'adreiça : https://www.aquodaqui.info/Un-quatuor-d-ecrivains-occitans-se-met-a-table-a-Belcodene_a841.html

NEUMULLER,Michel. Romieg Jumeau se's enanat.Aquò d'Aquí [en linha]. 2022. (Consultat lo 18 de julhet de 2022). Disponible a l'adreiça : https://www.aquodaqui.info/Romieg-Jumeau-se-s-enanat_a2315.html

Letra sus Marseille capitale de la culture

Annèxes



Une lettre de Rémi Jumeau en 2009

Graveson, le 13 juillet 2009

Chers amis,

Vous avez accepté de participer à notre projet, visant à inscrire la Culture d’Oc dans l’opération Marseille/Provence, capitale européenne de la Culture 2013. D’ores et déjà, une quinzaine d’écrivains et d’universitaires nous ont, comme vous donné leur accord, avec enthousiasme. Maintenant, il importe que vous nous indiquiez le ou les thèmes que vous désireriez développer à cette occasion. Nous vous rappelons, pour que notre projet ait quelque chance d’être sélectionné, que les thèmes correspondent aux critères ci-après : (ceux-ci ayant été définis par le comité technique de l’association Marseille 2013)

1-Pour ce qui concerne « la dimension européenne »

-Renforcer la coopération entre les opérateurs culturels, les artistes et les villes des Etats membres concernés et d’autres Etats membres, dans tout le secteur culturel.
-Faire ressortir la richesse de la diversité culturelle en Europe.
-Mettre en évidence les aspects communs des cultures européennes.

2-Pour ce qui concerne « la Ville et les Citoyens »

-Encourager la participation des citoyens, habitant Marseille et la Provence, susciter leur intérêt ainsi que celui des citoyens vivant à l’étranger.
-Avoir un caractère durable et faire partie intégrante du développement culturel et social à long terme de la Ville et de sa Région.

3-Enfin, ne pas oublier la dimension méditerranéenne de Marseille/Provence, d’autant que la réalisation du Musée des Civilisations d’Europe et de la Méditerranée, le MUCEM, devrait être achevée en 2013.

Si un thème comme celui des immigrations de masse aux XIXe et XXe siècles (italienne, espagnole ou maghrébine) a déjà fait l’objet de nombreuses études, les migrations internes (par exemple, celle des gavots vers plaines ou les villes du littoral provençal) ou vers les pays voisins (par exemple des occitans vers l’Espagne après la Reconquista, des Vaudois provençaux vers l’Italie, ou des Gavots vers le Mexique) mériteraient des développements intéressants.

Les critères sont donc suffisamment larges, (notamment ceux de la diversité culturelle et des échanges méditerranéennes) pour offrir une grande liberté dans les choix des sujets.

En conclusion, nous vous demandons de nous adresser d’ici fin août, les titres des thèmes que vous comptez traiter, de manière à ce que nous puissions commencer à bâtir notre projet commun. Si 2013 est l’année de la mise en œuvre globale de l’opération, c’est en 2009 que se fait la sélection, d’où notre demande. Recevez chers amis nos cordiales salutations



Le Président, Rémi JUMEAU

Hommages rendus par Jean-Marie Ramier le jour des obsèques

Sus lou cros de Roumié (divèndre 14 de janvié 2022, à Menèrbo)

Roumié, vaqui un credo de belèu lou faras tiéu : Lou Crédo dé Cassian dóu grand pouèto Vitou Gelu, Marsihés coume tu. N’en vaqui quàuqui tros.

A peri tout entié, qué servirié de neisse !
Dieou, que li vi tan lun, nou forgé pas per ren :
En mouren regrian ; l’ome quan dispareisse,
Va pupla leis estèlo oou foun doou firmamen !

Maduro avan lou tem, ma testo, qué vies blanquo,
A glena quaouquei gran dedin chasque gara.
Mies qué lou marguiié que rounflo sus sa banquo
Ai souven tria de grame ei sermoun doou cura.
Dei prepaou dei moussu, dei cansoun dei femèlo,
Dei questien dei nistoun, surtou, mi sieou nourri :
Tan qu’un secrè nouveou coutiguo sa cervèlo
Lou senigran voou pa mouri
A peri tout entié, etc …

Dieou mandan sa semenço ei ciele, à l’avanturo,
Coumo lou bastidan qué sameno soun bla,
Lou gran s’esparpaié lon de la vouto bluro :
Qu s’enregué d’eici, qu s’enané d’eila.
Nouesto grano encapé de toumba su la terro :
Aqui rescountrerian noueste premié relès,
Mounte tan de doulou duvien nou fa la guerro
Jusqu’oou suari, despui lou brès !...
A peri tout entié, etc…

Mai lou darnié badaou pa pu leou nous escapo,
Sian saia aperamoun senso cro ni palan ;
Aven entamena nouesto segoundo etapo ;
Anan mai espeli su d’un globou pu gran !
Aqui sian dejà mies : aven lou cor de ferri,
Vin pan d’ooutou, lei bras emé lei ner d’acié ;
Creignen ni cirourgien, ni drogo, ni cristèri :
Counoueissen plu la maladié !
A peri tout entié, etc…

Adelà fourra plu qué tout un pople laoure
Per gava finqu’eis uei quaouquei pouar a l’engrai ;
Aqui l’ooura plus ges dé riche, ni de paoure ;
Ni saven, ni bestias ; ni beou pitoué, ni lai !
Seren toutei parié souto la memo bacho !...
Pu gai qué de jouven qu’an chima lou claré,
Oouren noueste bouenur escri dessu la facho,
Coumo s’erian oou cabaré !
A peri tout entié,etc…

A cin-cen-milo lèguo oou dessu dei tounerro,
Sé nou pren fantasié dé durbi lou journaou,
Li veiren lei travai que nouesto ancieno terro
Fara, per si servi dei forço dé l’uiaou,
Coumo l’aplooudirian, soun assaou dé couragi
Dei reire-pichoun-fieou é dei reire-nebou,
Qué voudran counqueri lei nieou à l’arrambagi,
S’à la fin n’en venien à bou !...
A peri tout entié, etc…

Alor dei bouenei gen fenira plu la festo !...
Mai lei tigre, dé qué si voudran rapela ?
Semblaran d’estrangié ! degun li tendra testo
Perqué viroun toujou l’aiguo dins sei vala !
Leisso leis arpagoun ti trata d’imbecile :
En ti fasen cheri, moougra tou soun mespres,
Vidaou, places tei foun mies qué lou pus abile :
Oou milo per cen d’interes !...
A peri tout entié, etc…

La jalousié deis ome é sei bruteis entriguo,
Coumo s’en truffaren, quan seren tou-puissan !
Per quaouquei pessu d’or s’escaloun à la biguo,
Trouvaren à manès lei mouloun de diaman !
S’à la retiro-puou derraboun d’espouleto,
Dé capeou galouna, dé mitro de satin,
Qué sera tout aco, senoun de pampaieto
Su d’un lai viesti d’arlequin !...
A peri tout entié, etc…

Mai alor qué bouenur d’ooublida la coulèro !
Dé jouï doou printem senso apranda l’iver !
Dé dire ei capouchin qu’esfraieroun ta mero :
Reveran, boufa-li su lei brasiéd’infer !
Dé dire à Madeloun, quan lou pies li ressaouto :
Din noou-milo an d’eici, gento caligneiris,
Coumo vui, per passien ti mangearai lei gaouto,
E toujou mordrai frui requis !
A peri tout entié, etc…

Mestre, t’ai amarra su l’ancro d’esperanço :
Vai acaba ta pleguo entre leis afama,
E quan oouras feni ta vido de soufranço,
Vene trouva Cassian ei péis embeima.
Doou calici dé feou poues escouela lei gouto :
T’ai coupa lou bastoun qué ti duou sousteni ;
Parti premié ; veiras mei piado su la routo ;
M’agantaras à l’embruni…
A peri tout entié, qué servirié de neisse !
Dieou, que li vi tan lun, nou forgé pas per ren :
En mouren regrian ; l’ome quan dispareisse,
Va pupla leis estèlo oou foun doou firmamen !

Nàni, Roumié, risques pas de peri tout entié. Bèn lou countràri !

Restaras dins nosto memòri. Nous-autre, Gravesounen, t’avèn couneigu poulemisto arderous dins la colo d’Un Païs pèr Deman ; pièi, e subretout, au CREDD’O. Lou CREDD’O que n’en fuguères un di foundadou emai un valènt cepoun. Lou CREDD’O que n’en prenguères un jour la presidènci e la gardères dès an de tèms. Dès an qu’an fa flòri. Souto ta beilié l’Oustau di Petit venguè lou centre de recerco e d’estùdi recouneigu, indefugible e respeta que couneissèn vuei. Lou meteguères dins soun lustre, ié dounères si letro de noublesso. Quouro la santa te n’aliuenchè fisicamen, sian li testimòni que countunières de te soucita de tout ço que se debanavo de bon o de pas tant bon au CREDD’O. Gravesoun te dis gramaci.

Mai es tout lou païs d’O que gardara peréu souvenènço de tu. Siés esta un parangoun de la recounquisto de la lengo. Nosto lengo l’aprenguères emé passioun e n’en venguères lèu un escrivan de trio. Publiquères dins l’afaire de vint an uno deseno d’oubrage, tóuti saluda pèr la critico. Quau n’en pòu dire autant ? Te siés avasta ‘mé bonur dins quàsi tóuti li relarg de la literaturo : pouesìo, rouman istouri o d’aventuro, nouvello fantastico… E tout acò en gaubejant un lengage noble e eisigènt, à l’auturo de l’idèio auto que te fasiés de la lengo. Siés d’aquéli qu’an vicu, qu’an tengu nosto lengo vivo.

Vuei, es en terro de Menèrbo que sian vengu te rendre óumenage, un terraire de memòri e de resistènci. Nàni, Roumié, t’óublidaren pas !


Il y a des moments que l’on pense ne jamais vivre, et puis inévitablement, inexorablement, ils arrivent. C’est le cas pour cette disparition qui nous réunit aujourd’hui : comment accepter que Rémi, cet homme puissant, cet homme magnifique, qui était la bonté et la générosité même, ce mari, ce père, ce grand-père qui semblait indestructible soit terrassé par l‘âge et la maladie et repose aujourd’hui devant nous.

Au nom de Claire, son épouse, de Sylvie, de Manuel, de Frédérique et d’Anaïs, je vous remercie d’être venus, parfois de loin, pour l’entourer une dernière fois. Et ayons une pensée pour Sylvie et Nicolas que le Covid empêche d’être avec nous aujourd’hui.

Claire m’a demandé de retracer rapidement le portrait et la carrière de Rémi : je l’en remercie, je mesure l’honneur qui m’est fait mais aussi la difficulté de la tâche. Je vais essayer...

Rémi Jumeau est né à Marseille le 30 avril 1930.

Dès sa première année il se distingue en recevant, avec une grande modestie, le diplôme d’honneur du concours des bébés de 1931 : c’était sans aucun doute une prédestination !

De son premier mariage avec Simone Mouliérac naîtront ses deux enfants

  • Sylvie née à Marseille en 1955 dont il se plaisait à dire que c’était la parfaite petite marseillaise, jusqu’à ce qu’elle quitte Marseille. Mais si elle en a perdu l’accent, elle n’en a pas perdu l’humour…
  • et Manuel, né à Saint-Quentin en 1961, ce fils dont il était très fier, et qui a repris le flambeau de son père puisqu’il est aujourd’hui graveur.



Rémi débutera ses études chez les Jésuites, où enseignait son père, éminent professeur de mathématiques. Mais très vite il comprit que les équations et les logarithmes n’étaient pas faits pour lui ; il préféra intégrer l’Institution du « Sacré-Coeur » où il excella en histoire, en français, en latin et en grec. Il obtint même, à la fin de ses études secondaires, un diplôme d’éloquence, dans la plus pure tradition antique.

Fait plus étonnant : au cours de son service militaire, alors qu’on ne lui connaissait aucun penchant particulier pour l’armée, le Maréchal des Logis Rémi Jumeau se vit décerner un Certificat de Bonne Conduite par le colonel commandant le 405e régiment d’Artillerie Antiaérienne. Comme quoi il était bon partout !

Il poursuivra ses études aux Beaux-Arts, dans la section Gravure. Mais malgré ses incontestables dons artistiques et son espoir consacrer sa vie aux Arts Plastiques, il décida d’intégrer la société « Avenir Publicité » au sein de laquelle il fera toute sa carrière.

Ce fut un excellent choix, car il en gravit progressivement tous les échelons, parvenant jusqu’au poste de Directeur Régional qu’il occupa à plusieurs reprises, dans plusieurs régions de France, avant de terminer au siège à Paris.

Dans cette dernière partie de son parcours professionnel, il s’investit au sein des instances représentatives de la profession pour faire cohabiter la publicité et la défense du patrimoine. Les textes qui régissent aujourd’hui les conditions de publicité dans les paysages urbains et ruraux lui doivent beaucoup.

Lors de son départ d’Avenir Publicité, que la Direction générale a essayé de retarder autant que possible, un grand hommage lui a été rendu au Petit Palais à Paris par le Président Mr Boutinard-Rouelle.

C’est dans le cadre de son activité qu’il a rencontré Claire, qu’il a épousée en 1986 et avec laquelle il partagea quarante années d’un amour inconditionnel. Ils étaient réunis par l ‘amour des arts, lui la peinture et l’écriture, elle la danse et la musique.
Il hérite à cette occasion d’une nouvelle fille, Frédérique, qu’il considérait comme la sienne et qui l’adopta comme père.
Cerise sur le gâteau lui arriva Anaïs, sa petite fille, sa « petitoune » avec laquelle il avait une relation profonde, tendre, faite de multiples touches de complicité.

Bien qu’enrichi par ses voyages en France, et peut-être justement du fait de ses nombreux changements de résidence, il n’avait qu’une hâte dès sa retraite : retourner dans sa chère Provence. Lui le provençal convaincu n’a jamais accepté que la République, pour fabriquer un citoyen uniforme sur tout le territoire, ait combattu les cultures régionales : dès lors il a consacré sa vie à militer pour la cause provençale.
C’est la présidence du CREDD’O d’où il n’a cessé de lutter pour rendre sa dignité et sa place à la langue d’Oc.
C’est la participation au bureau de l’Association les Suds dès sa création en 1996.
C’est enfin l’Association du Festival d’Arles, « Les musiques du Monde », dont il fut le Président pendant dix ans.

Enfin et surtout, et c’était sans doute sa plus grande fierté, Rémi a pris sa plume pour écrire plusieurs livres en langue provençale, tous publiés.
Lui qui parlait peu, qui aimait aller à l’essentiel, qui était avare de ses mots et pudique sur ses sentiments, était prolixe dans ses écrits…
Selon un proverbe africain, continent où domine la culture orale, « un homme qui meurt c’est une bibliothèque qui brûle ». Pour Rémi c’est tout l’inverse : il nous laisse sa bibliothèque en provençal comme un témoignage ineffaçable.

Deux traits enfin que je voudrais souligner.

D’abord la fidélité et la profondeur de ses sentiments pour ses proches, qu’il aimait avec une égale tendresse et dont il ne s’est jamais départi.
Ensuite l’étendue impressionnante de sa culture : à ses côtés, on se plaisait à ne pas consulter Wikipédia quand on avait une question, assurés qu’il en connaissait la réponse.
Ce qui s’avérait toujours exact ! Rémi était une encyclopédie ambulante.

Mais si c’était un grand homme, calme, tranquille quoique souvent angoissé, pudique, digne c’était aussi – et là je laisse le mot de la fin à sa fille, un homme têtu comme 36 mules !

Merci, Rémi, pour tout ce que tu nous as donné, merci pour ce que tu étais, ta trace ne s’effacera jamais. Repose en paix.

Autor de l'article

Joan-Maria Ramier , ensenhant a la retirada d’Occitan-Lenga d’Òc dins l’ensenhament catolic e dins l’Académia d’Ais-Marselha. President deis associacions Un Païs pèr Deman, CEPD’OC (Centre d’Estudi de la paraula d’ÒC), membre dau Consèu d’Admenistracion dau CREDD’O (Centre de Rescòntre, d’Estudi, de Documentacion e de Difusion d’ÒC).

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